L’Agence tous risques : chronique

16-06-2010 - 07:16 - Par

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De toutes les adaptations de séries télé, c’est sans doute celle qui, a priori, pouvait le plus sombrer dans le Z. Et s’avère être au final une barre sur-vitaminée de fun cuisinée avec soin.

L’AGENCE TOUS RISQUES fait partie de ces séries télé glorifiées par des souvenirs d’enfance légèrement aveugles, qui occultent souvent la dure réalité : nous n’étions que des gamins jetant le Tann’s sur le sofa en rentrant de l’école, bouffant des P’tits Pimousses et s’extasiant devant l’iroquoise de Mr T. L’auteur de ces lignes le sait, il a encore dans le coin d’un placard les « big jim » d’Hannibal, Barracuda, Looping et Futé. Et le van GMC. D’époque. Forcément, certains tenteront bien de donner à ces souvenirs plus de grandeur qu’ils n’en ont vraiment. Osons le dire, L’AGENCE TOUS RISQUES était une mauvaise série, ancrée dans une médiocrité très 80’s, aux épisodes écrits comme une usine Herta confectionne des saucisses (à la chaîne), et dans laquelle Hannibal se déguisait en crocodile. L’AGENCE TOUS RISQUES, le film, conserve le seul intérêt de la série (les personnages et le pitch), et c’est à peu près tout. Tant mieux.

ATeamChroniquePosterVoilà près de quinze ans qu’Hollywood parle d’adapter sur grand écran l’histoire de ces quatre soldats, poursuivis par les autorités pour un crime qu’ils n’ont pas commis, et mettant leurs talents aux services de « ceux en ayant besoin ». Quinze ans de galère, de scripts infructueux, deux studios (Universal, puis aujourd’hui Fox), la défection de John Singleton en 2008, et une tripotée de rumeurs de casting, de Mel Gibson en Hannibal à Owen Wilson en Futé en passant par Woody Harrelson en Looping ou Ice Cube en Barracuda. Le sauveur de tout ce bordel se nomme Joe Carnahan, qui livre ici avant tout un script solide. Pas d’enjeux dramatiques essentiels (globalement, la A Team d’aujourd’hui cherche toujours à laver son honneur), mais un récit qui se déroule avec fluidité, qui prend son temps et expose une genèse bien torchée via un pré-générique de quinze minutes dantesque d’énergie et d’humour. Au bout de quarante minutes de métrage, l’incident déclencheur faisant de la A Team des parias n’a toujours pas eu lieu. C’est dire si Carnahan, tout en balançant scènes d’action utiles et justifiées, vannes à gogo (souvent hilarantes), petit commentaire acerbe sur la guerre en Irak et ses milices privées, retient sa sauce, bat la mayonnaise pour la faire monter tranquillement, pour au final rendre le tout foncièrement attachant et prenant, sans se forcer.

ATeamChroniquePic1Bien sûr, le récit a beau fonctionner, le chemin n’est pas dénué de toute ornière : fonds verts crades et CGI ratées, montage parfois trop frénétique rendant les (paradoxalement réussies) scènes d’action illisibles, mixage sonore trop bruyant, climax légèrement over the top et décevant, L’AGENCE TOUS RISQUES a les défauts de son époque, comme la série télé. Mais tout comme l’on peut apprécier un bon plat présenté n’importe comment dans l’assiette, L’AGENCE TOUS RISQUES convainc. Car, au contraire de nombre de blockbusters, le film de Carnahan, bien que voué uniquement au divertissement, ne prend pas cette tâche par-dessus la jambe. Etre fun se présente ici comme un sacerdoce, assuré avec humour, mais sans dérision, avec sérieux, sans se prendre au sérieux. Cette rigueur fait du lien unissant les membres de l’Agence le centre de toutes les attentions, et porte à bout de bras les personnages, qui ont de la chair, en dépit de leur folie ou leur côté cartoon. D’autant qu’ils sont portés par des acteurs s’amusant comme des gamins, sans oublier d’incarner avec conviction leurs alter ego. La palme à Sharlto Copley, totalement investi en Looping, et Bradley Cooper, qui confirme tout le bien que l’on pense de lui depuis ALIAS. Quand, après deux heures de projection, la lumière se rallume, la série télé n’existe plus. L’AGENCE TOUS RISQUES, ce sont eux. Et quand Carnahan s’amuse enfin à rendre hommage à la série dans les dernières secondes du métrage, et que la perspective d’une suite se fait prégnante, on signerait bien immédiatement. D’autant plus si l’acteur (dont on taira le nom) assumant le caméo final s’avère être le méchant du deuxième volet.

L’Agence tous risques, de Joe Carnahan. USA. 1h55. Avec Liam Neeson, Bradley Cooper, Sharlto Copley, Quinton Jackson, Jessica Biel. Sortie le 16 juin 2010.

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