Cannes 2011 : MELANCHOLIA / Critique

18-05-2011 - 12:15 - Par

De Lars von Trier. Sélection officielle, en compétition.


Synopsis : Justine et Michael célèbrent leur mariage en grande pompe dans la somptueuse demeure que possèdent la sœur et le beau-frère de la première. Pendant ce temps-là, la planète Melancholia se dirige vers la Terre… Un beau film sur la fin du monde.

Lars von Trier est un coquin. Alors qu’il y a deux ans, il avait choqué la Croisette avec son fabuleux ANTICHRIST, on attendait qu’il fasse subir encore bien des misères à Charlotte Gainsbourg et qu’il bizute Kirsten Dunst dans un film radical et méchant. Mais non. Si MELANCHOLIA a ce petit quelque chose de misanthrope qui a fait toute la carrière du réalisateur danois (le rôle de la mère confié à Charlotte Rampling est un modèle d’aigreur), il confère à son film une ambiance bien plus douce que précédemment, faisant de son nouveau film un drame assez sage quoi qu’assez terrifiant.
La fin du monde est proche car Melancholia, une planète jusque là tapie derrière le Soleil, fonce vers la Terre pour, sans nul doute, l’anéantir. Justine (Dunst) le sait, elle le sent, elle qui est si connectée à la vacuité de l’existence, si fataliste, qu’elle en est dépressive jusqu’à l’os. Claire sa sœur (Gainsbourg), plus pragmatique, préfère se voiler la face. Fin du monde oblige – l’un des thèmes les plus bouleversants que l’on puisse traiter au cinéma -, ce MELANCHOLIA est d’une beauté inédite, d’une picturalité qu’on avait touché du doigt dans ANTICHRIST mais qui s’assume aujourd’hui telle quelle. La séquence d’ouverture, agencée en tableaux apocalyptiques, nous plonge dans un tel enfer que la suite nous paraît injustement plus légère. Mais alors que l’on apprend à connaître les deux sœurs, à appréhender leurs peurs paniques respectives et leurs drôles de connexion au monde, on vit avec elles l’agonie de la vie, quand tout déchante et se délite autour de nous. Et quand la moindre touche de beauté (un mariage, par exemple) prend des allures de cauchemar. MELANCHOLIA, film de femmes puissantes et intenses où les hommes baissent les bras trop vite, peut donc comme son prédécesseur déranger, mais pas par ses images provocantes ou ses ruptures glauques (« Chaos Reigns ») mais par sa véritable et prégnante tristesse. Une mélancolie retenue et résignée. La Terre n’est pas bonne, ainsi doit-elle disparaître…

Jamais n’aura-t-on vu Kirsten Dunst dans un tel état de grâce, qu’elle rayonne en jeune épouse ou qu’elle redouble d’apathie en prophète moderne. La prise de risque de l’ancienne Mary Jane de SPIDER-MAN en valait définitivement la peine. Quoi qu’elle se solde en un rôle magnifique et non un personnage sur le fil.

Au delà de l’esthétisme hégémonique de Lars von Trier, au delà de sa faculté à vous plonger dans un malaise dont seul lui a le secret, on ne peut s’empêcher de constater que son expérience est trop longue, son récit parfois complaisant, son mordant évanoui. Que MELANCHOLIA soit pesant peut cependant ne pas être un problème pour tout le monde.

Melancholia, de Lars von Trier. Avec Kirsten Dunst, Alexander Skarsgard, Charlotte Gainsbourg, Kiefer Sutherland. 2h10. Sortie le 17 août.

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