Cannes 2011 : ONCE UPON A TIME IN ANATOLIA / Critique

20-05-2011 - 23:37 - Par

De Nuri Bilge Ceylan. Sélection officielle, en compétition.


Synopsis : La vie dans une petite ville ressemble à un voyage dans les steppes. L’impression que quelquechose de « nouveau et différent » naît derrière chaque colline…

Pendant toute une nuit, un docteur, un procureur, un commissaire et toute leurs équipes, arpentent les steppes d’Anatolie aux côtés des deux suspects d’un meurtre afin de retrouver le lieu où ces derniers ont enterré leur victime. Voilà pour le pitch de ONCE UPON A TIME IN ANATOLIA, qui n’a donc pas grand-chose à voir avec celui fourni par la production avant Cannes, et qui, en dépit de son titre, n’est pas franchement un conte de fées ni un Sergio Leone-movie. On n’en attendait pas moins de Nuri Bilge Ceylan, grand cinéaste visuel, roi de la composition de cadre et de la photo chiadée, chantre d’un cinéma esthétique, mais très aride. D’aucuns diraient « ennuyeux ». Certes. Sauf qu’en dépit de leur langueur et de leur exigence intellectuelle extrême, les films de Ceylan ont souvent proposé de quoi nourrir les appétits des cinéphages, même ceux des plus récicents à son style. On se souvient encore avec émotion des plans lumineux et charnels, en HD, dans LES CLIMATS, ou de la réalisation sans faille des TROIS SINGES (Prix de la mise en scène en 2008). Sauf qu’avec ONCE UPON A TIME IN ANATOLIA, Ceylan renoue plutôt avec l’ennui profond qu’avait engendré chez nous son UZAK (Grand Prix sur la Croisette en 2003).

Dans ONCE UPON A TIME IN ANATOLIA, pendant les premières 90 minutes, on parle beaucoup. De problèmes de prostate chez l’homme de plus de 50 ans. De miel aux alvéoles. de yaourt de lait de buffle. De sosies de Clark Gable. De panne d’électricité. Mais on ne s’intéresse pas franchement au récit, les personnages passant d’un lieu à un autre pour tenter de découvrir ce fameux cadavre. On comprend très vite que la chose ne sera pas franchement de l’efficacité d’un bon vieux « Faites entrer l’accusé », et Dominique Rizet manque cruellement à l’affaire. Car en toute honnêteté, quand, enfin, après 1h30 de bavardages intempestifs plombants, les héros tombent sur le corps sans vie enterré dans un champ, on souffle de soulagement. Anecdote : la presse a applaudi non sans ironie cet instant lors de la projection cannoise…

Sauf qu’après ce moment de libération, il reste encore près de 70 minutes. Et là, Ceylan nous assène de longues scènes de dictée de rapport d’autopsie, entrecoupés de rares moments d’émotion (le procureur traîne un passé conjugal tragique). Un propos forcément pertinent doit se cacher là-dessous, car on n’aura jamais l’outrecuidance de prendre Ceylan pour un idiot ou un arnaqueur. Mais impossible d’avoir envie d’aller le déterrer, tant le cinéaste ne donne jamais au public le moyen de s’y raccrocher. Pire, l’esthète qu’on aime tant ne délivre ici qu’un seul plan d’une beauté à tomber, mais terriblement fugace. Et pour cause, il s’agit d’un éclair zébrant la steppe, la nuit, éclairant des rochers et y laissant apparaître un visage de pierre. Une seconde de bonheur sur les 9600 que dure le film, avouons que ça fait peu.

Once upon a time in Anatolia, de Nuri Bilge Ceylan. Avec Yılmaz Erdoğan, Taner Birsel, Ahmet Mümtaz Taylan. 2h30. Prochainement

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