Cannes 2011 : HANEZU / Critique

17-05-2011 - 21:39 - Par

De Naomi Kawase. Sélection officielle, en compétition.

Synopsis : Région d’Asuka, berceau du Japon. Les habitants y nourrissaient autrefois leur existence du simple passage du temps – aujourd’hui, les gens n’ont plus cette patience. A l’époque, ils pensaient que les trois montagnes environnantes, Unebi, Miminashi et Kagu, étaient habitées par les dieux. Un poète en avait fait une métaphore des troubles qui l’agitaient. Aujourd’hui, Takumi et Kayoko mènent leur existence en tentant de prolonger les espoirs et rêves inassouvis de leurs grands-parents. Ils portent en eux les récits et l’esprit des siècles passés.

Avouons-le sans honte : le cinéma de Naomi Kawase nous apparaît souvent cryptique voire carrément hermétique. Avec LA FORÊT DE MOGARI, elle était toutefois parvenue à nous happer par la beauté esthétique de son film, et une ambiance tour à tour prenante, poétique et mystérieuse. Malheureusement, HANEZU nous a perdu à nouveau. Qu’a-t-elle bien pu vouloir nous dire avec cette histoire d’amour contrariée unissant Kayoko à deux hommes, Tetsuya (son petit ami) et Takumi (son amant) ? En quoi les séquences de rêverie cauchemardesque à base de sauterelles mutantes se relient au récit ? Même la répétition incessante d’un poème nippon du 8ème siècle, contant le triangle amoureux entres les montagnes Unebi, Miminashi et Kagu (on saisit la référence aux héros), ne nous en a pas beaucoup plus appris. On aura plus ou moins deviné que HANEZU convoque des siècles d’histoires, les fantômes du passé (via des flashbacks sur les grands-parents de Kayoko et Takumi) et les peurs du présent. Qu’il rend aussi hommage à la région natale de Kawase, celle de Nara, berceau culturel et politique du Japon. Si Naomi Kawase ne donne guère de clé sur le fond même de sa pensée, peu importe. Un auteur n’a pas à se justifier ou à tomber dans le didactisme pour nous intéresser. Mais il devient plus problématique de se raccrocher à HANEZU quand on ne saisit même pas la psychologie des personnages ou leur interaction, tant la narration s’avère décousue, languide et adepte d’ellipses maladroites. Alors qu’ils devraient être les moteurs de l’émotion, et ainsi notre porte d’entrée dans l’univers du film, les trois héros nous apparaissent si abscons que toute relation avec eux l’écran devient impossible. On aurait aimé pouvoir se rattraper avec les images, mais Kawase a par le passé fait bien mieux. HANEZU, ou la circonspection du Festival de Cannes 2011, et du coup, l’une de ses grandes déceptions.

Hanezu, de Naomi Kawase. Avec Tohta Komizu, Hako Oshima, Tetsuya Akikawa. 1h31. Prochainement.

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