Cannes 2011 : MICHAEL / Critique

14-05-2011 - 18:24 - Par

De Markus Schleinzer. Sélection officielle, en compétition.

Synopsis : Les 5 derniers mois de la vie commune forcée entre Wolfgang, 10 ans et Michael, 35 ans.

Chaque année, un film présenté à Cannes divise durement, crée la polémique, suscite applaudissements et sifflets. En 2011, il s’agit donc de MICHAEL, chronique des « cinq derniers mois de la vie commune forcée entre Wolfgang, 10 ans et Michael, 35 ans ». Entendez par là entre un pédophile et sa victime, retenue prisonnière dans son sous-sol. Pourtant, MICHAEL ne se prête pas franchement au scandale. Au contraire, pour son premier film (sacrée audace), Markus Schleinzer fait preuve d’une intelligence assez rare. Car jamais le film ne sombre dans l’indicible, jamais le cinéaste ne montre l’insoutenable. Ni même n’essaie-t-il d’émouvoir en se repaissant du sordide ou de la souffrance du jeune garçon molesté. Comme les films de Michael Haneke (dont Markus Schleinzer a été directeur de casting), MICHAEL est froid, clinique, minimaliste et pourtant très travaillé d’un pur point de vue de mise en scène.

MICHAEL ne prétend pas disséquer les sentiments de la victime – Schleinzer dit que cela serait indécent -, mais regarder le pédophile dans les yeux via une observation détaillée de son quotidien. Alors forcément, MICHAEL enfonce quelques portes ouvertes : oui, souvent, les pédophiles sont des voisins polis, des collègues appréciés. Michael, est tout ça, et devoir le constater assis, prisonnier d’une salle de cinéma pendant 1h30, est profondément effrayant et dérangeant. L’existence routinière du pédophile, disséquée par Schleinzer, n’en fait ni un monstre ni un homme comme les autres pour autant, car le cinéaste se refuse aussi bien à juger qu’à excuser. Ce qui pourrait faire de MICHAEL un film normand, bien assis entre deux chaises, presque voué à l’échec. Pourtant, il crée foule d’émotions, entre tension extrême et empathie poignante, car il nous met face à un thème auquel rarement on ose se confronter, et pour cause. MICHAEL nous rappelle ainsi que, comme la guerre, la maladie ou la mort, la pédophilie peut aussi être un sujet de cinéma. Car on combat toujours mieux ce que l’on connaît.

Michael, de Markus Schleinzer. Avec Michael Fuith, David Rauchenberger. 1h36. Prochainement.

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