Cannes 2011 : TRAVAILLER FATIGUE / Critique

12-05-2011 - 23:00 - Par

De Juliana Rojas et Marco Dutra. Sélection officielle, Un Certain Regard.

Synopsis : Helena réalise un vieux rêve : ouvrir un petit commerce. Elle loue un local abandonné et monte son affaire. Mais son mari Otávio perd subitement son travail et toute la famille est fragilisée. Au même moment, l’installation de l’épicerie ne se fait pas sans problème : des produits disparaissent, une odeur étrange imprègne le local et une tâche sur le mur ne cesse de grandir. Le local semble prendre vie, dans un climat qui perturbe toutes les personnes présentes, à commencer par Helena et sa famille.

Déjà passés par Cannes avec leurs courts-métrages, Juliana Rojas et Marco Dutra se lancent dans le grand bain avec leur premier long-métrage, présenté à Un Certain Regard. Certains de leurs travaux précédents avaient été comparés à Hitchcock et Cronenberg (rien que ça), et le duo, passionné de cinéma de genre (horreur et fantastique pour les citer), avançait un pitch assez alléchant pour TRAVAILLER FATIGUE. Soit celui d’Helena, nouvelle gérante d’une supérette qui semble peu à peu prendre vie, et où se déroulent des événements légèrement étranges. Sauf que le film n’a pas grand-chose à voir avec aucun des genres précités. Les cinéastes jouent surtout sur une certaine morbidité ambiante (plutôt réussie par moments, notamment grâce au décor glauque de la supérette), dont on ne sait jamais si elle va nous entraîner totalement dans le fantastique ou non. Ce qui, évidemment, n’a rien d’un défaut en soi, mais crée une certaine frustration. Car lorsque le « fantastique » fait enfin irruption vers la fin du film (on n’en dira pas plus) et que le mystère de la supérette est enfin dévoilé, cette révélation n’a plus aucune résonance émotionnelle réelle sur le spectateur. Pas vraiment un film de genre, donc, TRAVAILLER FATIGUE s’affiche plutôt en drame social, et cherche surtout à étudier les relations de pouvoir créées par le monde du travail. Rojas et Dutra analysent comment le père de famille voit son rôle de chef de meute se déliter quand il se retrouve au chômage et comment son épouse devient peu à peu paranoïaque voire odieuse lorsqu’elle devient patronne. Sauf que là aussi, TRAVAILLER FATIGUE n’atteint jamais vraiment sa cible. Dutra et Rojas, tous deux Brésiliens, ont presque trop à dire sur leur pays, qui connaît l’une des croissances les pus folles du monde. Si bien que leur analyse finit par enfoncer des portes ouvertes et se conclut sur une scène de séminaire coaching qui, même si on l’imagine réaliste dans le genre, apparaît grand-guignolesque. A vouloir danser sur trop de tableaux, les deux cinéastes se perdent totalement, et le spectateur avec.

Travailler fatigue, de Juliana Rojas et Marco Dutra. Avec Helena Albergaria, Marat Descartes, Naloana Lima. 1h30. Prochainement.

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