Cannes 2011 : HORS SATAN / Critique

16-05-2011 - 17:20 - Par

De Bruno Dumont. Sélection officielle, Un Certain Regard.

Synopsis : En bord de Manche, sur la Côte d’Opale, près d’un hameau, de sa rivière et ses marais, demeure un gars étrange qui vivote, braconne, prie et fait des feux. La fille d’une ferme prend soin de lui et le nourrit. Ils passent du temps ensemble dans le grand domaine de dunes et de bois à se recueillir mystérieusement au bord des étangs, là où rode le démon…

Sans vouloir en faire des caisses, on ne remerciera jamais assez Bruno Dumont d’exister. On a beau ne pas adhérer à tous ses films, le bonhomme nous a quand même offerts ces quatorze dernières années de sacrés chocs cinématographiques, LA VIE DE JESUS et FLANDRES en tête. Mais surtout, Dumont, sans doute l’un des esthètes les plus assurés et identifiables de l’Hexagone, fait partie des quelques cinéastes français dont chaque sortie attise notre curiosité et notre enthousiasme. Nouveau touchdown avec HORS SATAN, dont l’étrangeté et le jusqu’au-boutisme contrastent avec son dernier film en date, HADEWIJCH (sans doute son plus « faible »), et ramènent Dumont aux opus qui ont fait sa « gloire ». Il suit ici le mystérieux Garçon, qui réside sur une plage de la Côte d’Opale, et entretient une relation d’amitié chaste avec la Fille. Le Garçon, dont on ne sait s’il est un clochard céleste, un prophète ou un simple backpacker, se trimballe avec une carabine et en fait usage. Dès le tout début du film. Le Garçon semble aussi disposer d’une aura magique, qui pousse une villageoise à demander son aide lorsque sa fille semble possédée par le Démon. Mais surtout, Le Garçon n’apprécie pas du tout quand on s’en prend à La Fille.

On l’avoue, on n’ose pas en dire trop sur le récit de HORS SATAN. Tout d’abord parce que pendant plus d’une heure (sur 1h50), il se résume à : Le Garçon va voir la Fille, ils se baladent, puis se quittent et se retrouvent le lendemain. Mais ensuite parce qu’après cette errance naturaliste répétée à l’envie, emballant le spectateur dans une bulle envoûtante et déstabilisante, HORS SATAN dérive vers un récit fantastique. Mais du fantastique à la sauce Bruno Dumont. Si l’envie immédiate de voir le film ne vous prend pas aux tripes, on ne sait pas trop quoi dire de plus. Mis à part que le réalisateur signe là un opus d’une grande audace, réinvente un genre sans jamais en citer le moindre code, mais en y apportant sa patte et en convoquant tout ce que son cinéma a affiché de plus fort par le passé. A savoir compositions d’une précision et d’une beauté à tomber, paysages du Nord magnifiés au point d’en faire l’endroit le plus sublime du monde, acteurs au jeu parfois heurté mais habité, et dernier acte choc d’une singularité frappante. Bruno Dumont nous invite avec HORS SATAN à un film dont on ne sait jamais à l’avance ce qu’il nous prépare, et qui explore les concepts de Bien et de Mal avec une originalité prenante. Même jusqu’à la toute fin, impossible d’être sûr de ce que Dumont nous a montré. Une chose est sûre : devant HORS SATAN, on reste rivé à l’écran, attendant que chaque scène révèle une surprise ou une trouvaille. Et c’est le cas pour quasiment chacune d’elle.

Hors Satan, de Bruno Dumont. Avec David Dewaele, Alexandra Lemâtre, Aurore Broutin. 1h50. Sortie le 26 octobre.

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