Cannes 2011 : TOOMELAH / Critique

13-05-2011 - 17:43 - Par

De Ivan Sen. Sélection officielle, Un Certain Regard.

Synopsis : Au sein d’une communauté aborigène. Daniel, 10 ans, aspire à devenir un gangster comme tous les modèles masculins qui l’entourent. Il sèche les cours, il multiplie les bagarres, et vend de la drogue pour Linden, principal dealer de la ville. Daniel semble donc bien parti pour accomplir ses rêves. Mais quand un trafiquant rival est libéré de prison, la situation se renverse. Linden et son gang sont arrêtés tandis que Daniel se retrouve seul et vulnérable. Sera-t-il capable de choisir une voie lui garantissant un meilleur futur ?

Du cinéma australien, on connaît les stars (de Mel Gibson à Nicole Kidman chez les acteurs, en passant par George Miller et Phillip Noyce chez les réalisateurs), plus habitués à s’expatrier à Hollywood qu’à faire vivre une vraie identité cinématographique locale. Bien sûr, le cinéma des antipodes existe, et l’a encore prouvé récemment avec le formidable ANIMAL KINGDOM. Mais rarement a-t-il eu pour héros des Aborigènes, ou du moins rarement en a-t-on eu connaissance. Heureusement, Cannes est là et deux ans après SAMSON ET DELILAH à Un Certain Regard, nous présente TOOMELAH dans la même section. Le cinéaste Ivan Sen se focalise ici sur le quotidien d’un enfant, Daniel, bringuebalé entre des modèles masculins déviants (des malfrats) et une cellule familiale éclatée (père alcoolique, mère fumeuse de joints…), au sein d’une réserve aborigène réputée pour être l’une des plus pauvres d’Australie.

Ce qui aurait pu donner un bon gros moment de pathos déprimant suinte pourtant d’un amour de la vie assez ahurissant et d’une poésie doucereuse. Notamment parce qu’Ivan Sen a passé du temps à Toomelah, a observé ses habitants, partagé leur vie, et ne pose pas sa caméra en touriste voyeuriste. Il distille ainsi les détails du quotidien des Aborigènes vivant à Toomelah, afin de créer un background solide, mais n’en fait jamais le centre de son récit. Le réalisateur préfère se concentrer sur le parcours de Daniel – un enfant comme il doit en exister dans les favelas brésiliennes ou les bidonvilles de Bombay – et comment il va devoir se construire un avenir. Par la grâce d’acteurs amateurs (dont l’incroyable Daniel Connors), Ivan Sen capte cette réalité sans colère pamphlétique mais avec une douceur contemplative, parfois avec humour aussi, et ainsi, nous touche sans nous prendre en otage. On pourrait déplorer que les enjeux de TOOMELAH mettent un peu de temps à s’épanouir, mais la langueur du film prend pleinement son sens lors d’une scène finale magique et poignante, où Ivan Sen se prend le droit d’être légèrement démonstratif pour rendre pleinement hommage à ses héros, trop souvent ignorés.

Toomelah, de Ivan Sen. Avec Daniel Conners, Michael Conners, Daneeka Conners, Christopher Edwards. 1h46. Prochainement.

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