J’AI RENCONTRÉ LE DIABLE : chronique

06-07-2011 - 07:30 - Par

Le film de vengeance, genre ô combien casse-gueule, trouve l’un de ses étalons avec J’AI RENCONTRÉ LE DIABLE, plongée traumatisante dans l’œil du mal.

Que cela soit dit de but en blanc : c’est les tripes en vrac et incapable de déglutir que l’on sort du nouveau film de Kim Jee-woon. Et ce ne sont pas les tortures d’une rare perversité, les banquets cannibales ou le déluge d’hémoglobine qui nous mettent dans cet état loqueteux. Car, avant d’essayer de fasciner avec une violence ultragraphique, le réalisateur de DEUX SŒURS, A BITTERSWEET LIFE et LE BON, LA BRUTE ET LE CINGLÉ, nous prend surtout par la chemise. Nous colle les yeux dans ceux du Diable. Nous force pendant près de 2h30 à sonder ces abysses démoniaques. Et ainsi ressentir avec violence le dérangeant parcours psychologique d’un homme lancé comme un train fou sur les rails d’une vengeance autodestructrice. Dans J’AI RENCONTRÉ LE DIABLE, la popstar sud-coréenne Lee Byung-hun  – vu dans G.I. JOE et dans les deux précédents films de Kim – incarne Soo-hyun, un agent secret qui, lorsqu’il apprend que sa fiancée enceinte a été assassinée par un tueur en série, se met à le traquer sans relâche. Son but : faire subir encore et encore les pires souffrances à ce démon, interprété par l’immense Choi Min-sik (OLD BOY). Par la grâce d’un récit débutant avec une grande délicatesse empathique – on pense à la découverte du corps de la fiancée –, le cinéaste crée un lien d’une force incroyable avec le spectateur. Avant de le fouler rapidement au pied. Qui est le vrai démon ici ? Le tueur Kyung-chul, qui agit par instinct maléfique ou Soon-hyun, qui se laisse pervertir par sa soif incontrôlable de revanche ? Une question souvent explorée au cinéma, que Kim Jee-woon transcende avec un extrémisme narratif effrayant. Jusqu’au dernier plan, il ne s’excusera jamais de ce qu’il montre, conscient que, pour lever toute ambiguïté, il doit mener son héros vengeur au bout de sa quête. Aussi perverse soit-elle, histoire d’asséner sa morale avec encore plus de force. Mais pas de leçon pour autant : J’AI RENCONTRÉ LE DIABLE, bien plus qu’une thèse, est surtout un immense moment de cinéma, nerveux et prenant, que la densité de l’esthétisme, le sous-texte politique et le talent des acteurs élèvent au rang de diamant noir de l’année.

J’ai rencontré le diable, de Kim Jee-woon. Avec Choi Min-sik, Lee Byung-hun. Sortie le 6 juillet.

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.