Cannes 2012 : LES BÊTES DU SUD SAUVAGE / Critique

18-05-2012 - 16:40 - Par

De Benh Zeitlin. Sélection officielle, Un Certain Regard.


Synopsis : Hushpuppy, 6 ans, vit dans le Bayou avec son père. Brusquement, la nature s’emballe, la température monte, les glaciers fondent, libérant une armée d’aurochs. Avec la montée des eaux, l’irruption des aurochs et la santé de son père qui décline, Hushpuppy décide de partir a la recherche de sa mère disparue.

La première grande découverte du festival, nous la tenons. Déjà récipiendaire de la plus haute distinction au festival de Sundance, BEASTS OF THE SOUTHERN WILD (LES BÊTES DU SUD SAUVAGE, en VF) est de ces films qui vous hypnotisent, vous fascinent, vous coupent le souffle, vous baladent dans un univers onirique où la féérie apparaît ça et là par petites touches, de manière discrète, au beau milieu du néant. Via des décors sauvages et sophistiqués (le sud des bayous encore inviolé de l’Amérique, transformé ici en communauté utopique), une ambiance de carnaval de Louisiane, l’odeur qui flotte dans l’air et imprègne l’écran (un mélange de porcherie, de rouille, d’alcool, de mort et de poulet qui cuit) et via l’incroyable prestation d’une fillette haute comme trois pommes. Quvenzhané Wallis incarne Hushpuppy, élevée par un père qui veut en faire un caïd prêt à tout surmonter. Sa mère est depuis longtemps partie et Hushpuppy passe son temps à se questionner sur la loi de la nature, à confronter son père et à s’occuper des animaux qui lui servent de compagnons. Tous les jours, au fond de la caravane miteuse qui lui sert de cabanon, elle se confronte à la vie, dont la cruauté reflète l’incroyable pouvoir, et un jour, c’est la force des éléments qui va bouleverser son observation passive de l’équilibre de l’univers. Notre jeune actrice (9 ans), loin d’être une bête de foire surdouée comme les USA en pourvoient, préfère jouer de regards féroces que d’une profusion de mots (la voix off, c’est elle, mais c’est l’une des rares occasions où le son de sa voix se faire entendre). C’est un petit bout de grâce, aux yeux interrogateurs et à la moue colérique. Et elle porte, de bout en bout, ce récit initiatique, convoquant le mystère de la préhistoire, la peur du futur, et l’acceptation de l’ordre des choses. Elle va donc devoir intégrer qu’elle est une survivante. Pour parfaire un peu plus la prestation de sa jeune héroïne, son metteur en scène, Benh Zeitlin, l’habille d’une imagerie surpuissante de fin du monde, d’un mixage d’orfèvre, et d’une caméra urgente. Et s’il pose parfois son cadre pour assagir le rythme aliéné, c’est pour mieux multiplier les images iconiques. En la matière, Benh Zeitlin conclut sa fable dans une séquence d’anthologie, enchaînant des scènes à la portée philosophique rappelant indubitablement le TAKE SHELTER de Jeff Nichols. Rares sont les films, violents et délicats, qui provoquent physiquement, chez le spectateur, une telle overdose d’émotion.

De Benh Zeitlin. Avec Quvenzhané Wallis, DwightHenry, Jean Battiste Levy. USA. 1h32. Prochainement

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