THE AMAZING SPIDER-MAN : chronique

21-06-2012 - 15:27 - Par

Le retour de l’Homme Araignée, en mode reboot, était observé avec circonspection. Marc Webb se sort de (presque) tous les pièges, et livre une nouvelle version élégante, émouvante et exaltante. Notamment grâce à un grandissime Andrew Garfield.

Doit-on réellement pitcher THE AMAZING SPIDER-MAN : un adolescent piqué par une araignée, etc. ? Non, évidemment. Car l’histoire de Spider-Man, super-héros Marvel le plus connu et adoré au monde fait partie de notre culture, de notre inconscient collectif. D’autant plus depuis 2002 et le premier opus cinéma signé de main de maître par Sam Raimi. Dix ans seulement après, Sony décide de rebooter la chose, et de nous conter à nouveau la genèse de l’Araignée. De quoi énerver certains – dont nous au départ –, de créer l’indifférence polie chez d’autres, ou de prouver la décrépitude d’une Hollywood manquant cruellement d’idées. Pourtant, au fil de la production, THE AMAZING SPIDER-MAN s’est fait de plus en plus engageant et intrigant, au point que l’attente s’est au final faite fébrile à l’approche de le découvrir. Spider-Man est un héros trop important, trop aimé, pour qu’il ne mérite pas le meilleur. Soulagement. Marc Webb se tire de quasiment tous les pièges, et signe un retour tonitruant pour Peter Parker. Car loin de s’aligner sur ce qu’avait fait Sam Raimi, il apporte ici un véritable regard personnel, où Spider-Man se fait davantage héros de la réalité que de comic book. L’ambiance y est donc plus proche de notre quotidien, que de celle, grandiloquente et cartoonesque (mais délicieuse), développée par Raimi. Optant pour une mise en scène tirant merveilleusement partie du clair obscur, et d’ambiances crépusculaires, Webb lorgne davantage vers Michael Mann, sans pour autant faire de Spider-Man un héros sombre à la Batman.

Non. Spidey reste ici terriblement fidèle à ce que l’on aime et connaît de lui : working class héro – la preuve dans une scène sublime impliquant des ouvriers –, petit génie introverti à l’humour gouailleur absolument délectable, il semble tout droit sorti des pages de Stan Lee, sans pour autant n’être qu’un pantin destiné à ne satisfaire que les lecteurs de BD. L’universalité de Spider-Man / Peter Parker, Marc Webb l’a bien comprise, et il la retranscrit avec un élan absolument exaltant. Le récit prend ainsi son temps pour présenter chacun des personnages, leurs interactions, et le destin de Parker ne paraît jamais précipité. Webb explore ainsi ses traumas avec une sincérité touchante, et même les passages obligés – comme la mort de l’Oncle Ben, bouleversante, ou la piqûre matricielle – se découvrent comme pour la première fois, car Webb et les scénaristes du film parviennent à les circonscrire à de nouvelles situations, au sein de nouveaux enjeux, et à en tirer de nouvelles conséquences. Ces légers décalages de point de vue suffisent à offrir à l’Araignée une nouvelle peau, et à relancer notre intérêt. En effet, en plaçant la disparition des parents de Peter Parker au centre du récit, THE AMAZING SPIDER-MAN recadre le personnage, et en fait un adolescent en quête d’identité morale et intellectuelle, plus qu’un adolescent en découverte de son corps ou de ses pouvoirs. Ce parcours psychologique, but ultime de ce reboot, Webb le mène à bien avec une dextérité assez redoutable, et adopte une méthode proche de celle de Chris Nolan sur Batman, en faisant du méchant un miroir signifiant dans lequel se révèle le héros. Ainsi, la quête de Spider-Man passe par sa Nemesis : un Curt Connors campé à merveille par un Rhys Ifans d’une classe folle, dont l’alter ego monstrueux, Le Lézard – d’un photoréalisme bluffant – est une réussite totale, tant d’un point de vue narratif que spectaculaire.

Car Webb, s’il se concentre sur le parcours psy de son héros, sait aussi faire de THE AMAZING SPIDER-MAN un spectacle d’une efficacité imparable. Certes, on pourra regretter que le réalisateur passe parfois à côté de potentiels moments forts – la première fois que Spidey revêt son costume est ‘anticlimactique’, par exemple. Mais nombre de scènes s’imposent immédiatement comme iconiques, et d’une puissance rare. D’autant que Webb parvient perpétuellement à renouveler la façon de filmer son héros, ses poses ou les moments de bravoure. Et même lorsque Spider-Man fait ce qu’il sait faire de mieux – sauver le monde –, il parvient à insuffler à ces séquences un sens profond pour la psyché de son personnage. Un héros qui, cerise sur le gâteau, est interprété par un Andrew Garfield totalement ahurissant de maîtrise. Qu’il joue à l’amoureux avec une Emma Stone parfaite en Gwen Stacy, qu’il soit le Spidey grande gueule ou le Peter Parker incrédule de découvrir ses pouvoirs, qu’il sombre dans la colère, la peur ou l’héroïsme, Garfield livre une prestation totalement stellaire. Chacune de ses émotions tombe juste, chacun de ses mouvements semble empreint de réflexion. Et, animant chaque plan d’une présence inégalée, il irradie la pellicule de sa noble beauté et de sa compréhension du personnage. Rien que pour le voir redonner vie avec tant de grâce à un héros que l’on pensait à jamais attaché à Tobey Maguire, THE AMAZING SPIDER-MAN valait la peine d’exister. On a désormais qu’une seule hâte : après ces superbes promesses, voir la saga s’épanouir dans de nouveaux volets. Comme quoi, le bégaiement dans lequel sombre Hollywood depuis quelques années, n’est pas forcément voué à n’engendrer que des produits sans saveur ou sans légitimité. Ici, c’est même tout le contraire.

De Marc Webb. Avec Andrew Garfield, Emma Stone, Rhys Ifans. Etats-Unis. 2h17. Sortie le 4 juillet.

Note de la rédaction : 4,5 / 5 

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