THE DARK KNIGHT RISES : chronique

18-07-2012 - 19:11 - Par

La trilogie de Christopher Nolan se boucle dans une grande poésie et une tristesse terrible. Et s’érige, à l’instar de son prédécesseur, comme un film total.


Il y a quatre ans, THE DARK KNIGHT redistribuait les cartes du genre comic book movie, fort d’un cinéma noir, urbain, empruntant davantage aux codes du polar qu’à ceux de la BD. Le choc auprès d’un public fédéré et de l’industrie a été si grand qu’il fallait à Christopher Nolan transcender l’effet de surprise et asseoir ce style agressif et sérieux dans un film aussi solide, si ce n’est plus. Un pari hautement réussi avec ce troisième opus qui voit Batman affronter Bane, un super-vilain qui le poussera à surpasser sa condition paradoxale de super-héros mortel. Avec pour décor un Gotham repu de ses excès mais apaisé par la disparition temporaire du Dark Knight, l’histoire est celle d’une société et d’une économie qui vont s’écrouler, sous l’impulsion extrémiste du mercenaire Bane, arguant qu’il est temps de rendre le pouvoir aux citoyens de Gotham. Face au chaos et à l’anarchie, Batman – rendu responsable de tous les maux passés de la mégalopole – va pourtant cristalliser l’espoir. THE DARK KNIGHT RISES est une bombe lancée à l’encontre du dérèglement financier du monde actuel et des inégalités qui le ronge, et lance un avertissement clair autant sur l’effet dévastateur des soulèvements de masse que sur les récupérations idéologiques de la révolte. Le tout avec une mise en scène massive et une forte imagerie de révolution glanée autant à la révolution française (avec des procès dignes de la Terreur) qu’au plus récent phénomène Occupy Wall Street. Mais le background politique pertinent du film de Nolan (bien qu’il soit parfois asséné à l’enclume via des dialogues un poil didactiques) n’est pas forcément ce qu’il y a de plus marquant.

Ne dérogeant pas à la règle déjà imposée en deux films, Nolan a créé en Bane le vilain parfait pour pouvoir continuer à dépeindre la personnalité, tragique, de son super-héros. Et ici, il est question d’un portrait d’une mélancolie terrible. Condamné au silence pour le bien commun, puis rappelé au devoir, Batman se voit attaqué dans sa chair par la bête surpuissante incarnée par Tom Hardy. Moins pervers, moins fantasque et peut-être moins fantasmatique que le Joker mais prêt à en découdre physiquement, Bane rappelle sans cesse à son adversaire qu’il n’est que faiblesse humaine. Que ses gadgets ne valent rien face à la détermination de ses ennemis. Alors Batman, enclin à l’instinct d’autodestruction et de mort mais prêt à embrasser la peur, ne cesse de tomber et de remonter, d’espérer et de déchanter, comme un Sisyphe moderne à la vaine mission. C’est évidemment là que Christian Bale étale une palette de jeu inouïe dans un registre d’une tristesse accablante. Face à lui, Joseph Gordon-Levitt – dans son rôle de bon flic rompu au « serve and protect » – est son reflet idéaliste, non moins bouleversant. Mais les deux se rejoignent dans la grande fresque sur l’abnégation peinte avec poésie par Christopher Nolan, perpétuant le propos de THE DARK KNIGHT tout en lui conférant une richesse d’émotions encore plus ample. Psychologiquement dense, TDKR multiplie les allers retours avec ses deux prédécesseurs, offrant une cohérence implacable à la trilogie. La concluant même dans une apothéose totale pour les fans du Caped Crusader. Mais avant cela, avant de s’émerveiller devant une fin idéale, il y a 2h45 de drame intimiste, de tristes ruptures amicales, de regards amplis de déception, d’interrogations sur la démocratie et l’ordre, de scènes d’action terroristes à glacer le sang, de grand et beau cinéma. Chez Nolan, aucun défi ne peut crever le mythe Batman.

De Christopher Nolan. Avec Christian Bale, Joseph Gordon-Levitt, Anne Hathaway. Etats-Unis. 2h45. Sortie le 25 juillet

Note : 4,5/5

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