DES HOMMES SANS LOI : chronique

12-09-2012 - 09:25 - Par

De la poussière, de la sueur et du sang pour retracer, avec grandiloquence, un petit bout de l’histoire américaine.

Le réalisateur australien John Hillcoat a quelques marottes : travailler à partir des scénarios de son ami musicien et grand storyteller, Nick Cave, et toujours retracer – sans manichéisme – comment une civilisation se bâtit, survit ou s’autodétruit en retrouvant son animalité profonde, généralement pour le pire. De THE PROPOSITION à LA ROUTE, en passant par DES HOMMES SANS LOI évidemment, son cinéma n’est donc pas exempt de cruauté triviale et de forts sentiments de domination. Si ce n’est d’une écrasante virilité. Ici, il nous présente les frères Bondurant, bootleggers dans les années 30. Tout le comté de Franklin en Virginie le sait : ces trois gars-là sont immortels. Forrest (Tom Hardy) est bien trop dangereux pour que Dieu le rappelle à lui. Howard (Jason Clarke) a traversé la guerre grâce à des instincts bestiaux. Jack (Shia LaBeouf), plus fragile mais malin et relativement veinard, slalome entre les pièges que l’époque, difficile, lui tend. Tous les envieux et les redresseurs de torts environ vont alors vouloir mettre un terme à la légende toute puissante des Bondurant. Une histoire assez fascinante racontée au rythme des balles dans le buffet, des lames tranchant des gorges et des borborygmes des frangins peu commodes et pas plus loquaces… Au point que narrativement, DES HOMMES SANS LOI ne semble pas plus complexe qu’un vieux western sans prestige. Mais si la trame est classique, le film d’Hillcoat est diablement plus sophistiqué que son teint jaunâtre et poussiéreux ne le suggère. Et c’est dans la relation entre les trois frères, mêlant l’affection retenue et l’amour contrit, que l’histoire s’épanouit au- delà du gangster movie. Dans ces étincelles sentimentales et dans la manière dont les Bondurant sont façonnés par les femmes (leur force et leur point faible). Ils sont, à eux trois, un mythe grandiloquent, rappelant à l’Amérique que sa force n’est due qu’à son désir de dominance et que son histoire est en partie bâtie sur un délire de puissance mégalomane. La mise en scène, pourtant fonctionnelle, peut alors devenir démonstrative, les prestations de nos quelques protagonistes (Tom Hardy en tête) se font alors outrancières… jusqu’à nous tirer de francs sourires. Il y a une grande poésie et une profonde empathie dans le portrait très noir que tire Hillcoat de ceux qui ont une réputation à défendre et qui croient être plus forts que la mort. Et ce, dans chaque regard, dans chaque dialo- gue. DES HOMMES SANS LOI est sans nul doute un film mainstream, mais il est bien plus émouvant pour qui prête attention.

De John Hillcoat. Avec Tom Hardy, Shia LaBeouf, Jason Clarke. États-Unis. 1h55. Sortie le 12 septembre

Note de la rédaction : 4/5

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.