FOR ELLEN : Interview de Paul Dano + Chronique

18-09-2012 - 13:51 - Par

Découvrez ce drame indépendant américain bouleversant, en salles dès demain, et dans lequel Paul Dano livre une prestation splendide.

CHRONIQUE

Un jeune père absent cherche la rédemption. Juste et poignant.

Dans TREELESS MOUNTAIN, son deuxième et précédent film, la réalisatrice Kim So Yong suivait deux petites filles laissées seules par leur mère. Pour son troisième projet, FOR ELLEN, elle continue de creuser les relations enfants/parents. Joby, jeune rock star, apprend lors de son divorce qu’il doit renoncer à ses droits sur sa fille Ellen, qu’il n’a jamais vue. Il comprend alors ne pas être prêt à tirer un trait sur elle. Plutôt que de se précipiter dans les passages obligés du « film de divorce » en quête de pathos et d’hystérie lacrymale, Kim préfère tirer de ce sujet sensible une exploration psychologique tout en non dits de Joby, campé par un Paul Dano dégageant une imparable puissance émotionnelle. D’autant que la caméra de Kim ne le quitte jamais, l’enserre perpétuellement dans un cadre claustro et des décors d’une tristesse sans nom, renvoyant souvent avec malice à ses états d’âme. Si le récit de FOR ELLEN se perd parfois dans des vagabondages légèrement superfétatoires, cette construction en détours finit par payer dans un dernier acte d’une grande beauté et d’une justesse rare.

De Kim So Yong. Avec Paul Dano, Jon Heder, Shaylena Mandigo. États-Unis. 1h33. Sortie le 19 septembre

Note de la rédaction : 4/5

INTERVIEW DE PAUL DANO

De passage au festival de Deauville pour présenter FOR ELLEN et ELLE S’APPELLE RUBY, mais aussi pour y recevoir le prix « Nouvel Hollywood », Paul Dano s’est longuement entretenu avec Cinemateaser sur son actualité, et sa carrière. Découvrez ici ses réflexions sur le magnifique FOR ELLEN. L’intégralité de l’interview, ce sera dans Cinemateaser Magazine n°18, en kiosques le 26 septembre.

FOR ELLEN est votre deuxième film en tant que producteur après GIGANTIC. Cette implication sert-elle, pour vous, à assurer l’existence de projets fragiles ?

Oui, c’est exactement ça. Sur GIGANTIC et FOR ELLEN, je suis producteur exécutif, mon rôle est donc surtout créatif. Je m’implique très tôt dans le développement pour aider ces films à exister, à assurer l’implication d’autres acteurs. Si le réalisateur souhaite que j’assume ce rôle, je suis très heureux de le faire. Car plus vous êtes engagé, plus vous tenez à un projet. Le plaisir est plus grand aussi, et l’expérience plus personnelle. Mais je me satisfait aussi d’être simplement acteur : une fois sur le plateau, je n’influe pas vraiment sur la production. Je ne pense pas pouvoir en être capable, de toute façon. Mais cela me permet de développer des films que j’aurais envie de voir, auxquels je tiens. C’est parfois difficile de monter certains projets, donc si je peux aider…

GIGANTIC, comme FOR ELLEN, parlait de paternité. Est-ce une coïncidence ou est-ce un thème qui vous tient particulièrement à cœur ?

C’est une totale coïncidence. Je ne suis pas père… Mon personnage dans GIGANTIC était intéressant, notamment dans son désir d’adopter un enfant. Dans FOR ELLEN, Joby n’a aucune expérience en tant que père et le film traite davantage de la première rencontre avec sa fille. Je trouvais Joby fascinant, et le script très émouvant.

Joby est une wannabe rock star. Vous êtes musicien vous-même, dans le groupe Mook. Peut-on dresser quelques parallèles entre vous et lui ?

Non, nous sommes plutôt opposés. Lorsque je fais de la musique, je me soucie peu de la finalité. Joby lui, est motivé par l’idée d’être une rock star, d’être célèbre, et d’avoir un mode de vie très particulier. Cela dit, le fait d’être musicien m’a donné accès à une certaine empathie pour le personnage. Surtout que je connais pas mal de gens qui ressemblent à Joby, aussi bien dans le monde musical que dans le cinéma… Dans FOR ELLEN, je voulais explorer un type de musique que j’écoute assez peu en général : le hard rock contemporain. Comme moi, Joby a commencé par écouter des groupes comme Guns ‘N Roses ou AC/DC. Donc je le comprends, en un sens. Mais le hard rock moderne, je n’y connais rien. Donc je me suis mis en tête de découvrir ce genre, et de comprendre ce qu’il apportait à ceux qui l’apprécient.

Dans FOR ELLEN, le cadre est extrêmement resserré sur vous. Comment cette composition a-t-elle pesé sur votre interprétation ?

Je comprenais tout à fait ce que faisait la réalisatrice Kim So Yong, et j’étais tellement dans mon personnage… Nous avons tourné dans une toute petite ville, en très peu de temps. Donc une fois dans la peau de Joby, je n’ai pas eu le temps d’en sortir avant la fin du tournage. Peu importait où était placée la caméra, je me sentais bien. C’était passionnant de pouvoir tenter des choses, laisser la caméra tourner, débuter une scène et voir où elle me portait. Joby se sent prisonnier de sa vie, et subit cette ambiance claustro, mais ce n’était pas du tout mon cas. Je me suis senti très libre, au contraire.

FOR ELLEN fuit le pathos et ne force pas le spectateur à être ému. Cela tient notamment à votre rapport à l’écran avec votre jeune partenaire, Shaylena Mandigo, qui joue votre fille. Comment avez-vous travaillé avec elle ?

Je me suis dit que si je connaissais parfaitement Joby, son background, sa vie, sa psychologie, la première partie du film – avant qu’il rencontre Ellen – coulerait d’elle-même. Je me suis donc penché avant tout sur ses frustrations, sur son narcissisme, sur la façon dont il se comporte avec autrui. Joby est très autocentré. Mais en présence d’un enfant, vous êtes obligé d’être dans le moment présent, car vous avez le devoir de le protéger contre les dangers du quotidien. Cela vous force à vivre au présent. Ce que Joby n’a pas fait depuis bien longtemps. Du coup, j’ai vraiment essayé de ne pas trop réfléchir à mes scènes avec Shaylena et de les laisser se dérouler telles quelles. Nous avons filmé de façon très intime. Quand nous étions dans une voiture, cela sonnait vrai. Bien sûr, il y avait une caméra, mais jamais je n’ai ressenti sa présence. FOR ELLEN était vraiment un tournage organique, sincère. Certains acteurs n’aiment pas travailler avec les enfants, et je comprends pourquoi, mais cela vous force vraiment à être honnête, selon moi.

Le fait que vous aussi ayez débuté assez jeune a peut-être permis de créer cette alchimie, et une certaine confiance de Shaylena Mandigo à votre égard, non ?

Oui, peut-être. Ce qui est sûr, c’est que sur le tournage, j’étais en mode Joby (sourire). Alors avant les prises de vue, j’ai souhaité rencontrer Shaylena et lui montrer qui j’étais dans la vie. Car Joby peut être déconcertant pour un enfant. Je voulais lui prouver que je n’avais rien à voir avec lui, que j’étais un bon gars, et que le tournage serait comme un jeu, dont il fallait qu’on tire parti pour s’amuser ensemble.

FOR ELLEN, en salles le 19 septembre

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