Les réalisateurs de LITTLE MISS SUNSHINE reviennent bousculer le monde tranquille de la romcom.
Sorte de néo-J.D. Salinger, Calvin peine à donner une suite à son premier succès de librairie. Empêtré dans un quotidien noirci par une récente rupture, il passe du sofa de son psy à son bureau, sans parvenir à retrouver l’inspiration. Jusqu’à ce qu’il rêve d’une jeune fille, Ruby, qui va relancer la machine. Mais un matin, Calvin se réveille et Ruby est là, dans son salon. Rêve-t-il ? Sa création a-t-elle réellement pris vie ? Calvin décide de profiter de cette romance nouvelle qui, de doux songe, va se transformer en cauchemar… On l’aura vite compris, ELLE S’APPELLE RUBY lorgne vers le mythe de Pygmalion, sculpteur tombant amoureux de son oeuvre. Mais loin de se la jouer tragédie mythologique, le nouveau film de Jonathan Dayton et Valerie Faris entend renouveler avec élan la comédie romantique, trop souvent engluée dans des codes redondants. Porté par un scénario signé par la très prometteuse comédienne et dramaturge Zoe Kazan (qui tient aussi le lead féminin), ELLE S’APPELLE RUBY s’interroge autant sur la création artistique – sur un mode décalé à la ADAPTATION. de Spike Jonze – que sur l’amour comme moteur de construction de nos vies. Un vaste programme donc, que le script parvient à explorer avec malice, par la grâce de personnages profondément attachants, car affublés de qualités et défauts ô combien réalistes. On admire donc la précision d’écriture de la toute jeune Kazan, qui jamais ne sombre dans les clichés sirupeux de la romcom, et fait preuve d’une ironie et d’un talent de dialoguiste hors pair. On se délecte aussi de l’absurdité des situations, relayée avec brio par un Paul Dano impérial et un Chris Messina brillant dans un rôle peu évident relayant l’incrédulité du spectateur. Sans compter la solaire Kazan, qui réinvente avec passion l’archétype de la « fille à problèmes » dont s’entichent les romantiques. Surtout, ELLE S’APPELLE RUBY se révèle plus surprenant qu’il n’y paraît, menant son récit vers des recoins plus sombres qu’attendu, jusqu’à un climax effrayant et bouleversant. On regrettera juste les quelques détours légèrement chics de l’ensemble – dont une bande-son allant de Schubert à Sylvie Vartan, des références un poil trop hipster et des apparitions peu fouillées d’Antonio Banderas et Annette Bening – qui font pencher ELLE S’APPELLE RUBY vers du Wes Anderson light, et lui font ainsi perdre un peu de son identité.
De Jonathan Dayton et Valerie Faris. Avec Paul Dano, Zoe Kazan, Chris Messina. États-Unis. 1h43. Sortie le 3 octobre
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