PAPERBOY : chronique

16-10-2012 - 09:18 - Par

Lee Daniels adapte le polar de Pete Dexter et fait une vraie proposition de cinéma, dans toute sa radicalité.

En 1969, deux journalistes brillants de Miami, Ward Jansen (Matthew McConaughey) et Yardley Acheman (David Oyelowo) rejoignent le fin-fond de la Floride pour mener leur petite enquête : Hillary Van Wetter (John Cusack), qui attend son heure dans le couloir de la mort, est-il vraiment coupable du meurtre qu’on lui impute ? Aidés par Charlotte Bless (Nicole Kidman), fiancée par correspondance à l’accusé, et Jack (Zac Efron), le petit frère de Ward qui leur sert de chauffeur, ils vont remonter la trace du crime. Peu à peu, rongés par leurs ambitions et leurs obsessions, tous vont goûter à l’ambiance délétère régnant dans les environs. En portant sur grand écran l’excellent roman de Pete Dexter (un page turner imparable), Lee Daniels a fait des choix, en parfaite adéquation avec ses marottes d’auteur/réalisateur. Il a volontairement élagué l’investigation, il a également sacrifié l’importance de certains personnages, en a donné plus à d’autres, secondaires dans l’histoire de Dexter. Et ce, dans un but des plus personnels : tirer du squelette narratif le portrait plus général d’un pays de misère. Une terre dépeinte comme hantée d’âmes solitaires et exclues du rêve américain, accablée par le racisme et l’homophobie, et dont les démons s’expriment dans la violence la plus perverse. Lee Daniels opte donc pour un film profondément inconfortable, dans lequel Zac Efron, Nicole Kidman ou John Cusack sont hypersexualisés en gros plans, laissant une vague impression de pornographie soft. Le rythme de PAPERBOY est, lui, instable, cassé par de nombreuses ellipses ou autres digressions. Sous le lustre d’un film mainstream, tout est inquiétant, des décors de marécages aux visages haineux d’Oyelowo ou Cusack embourbés dans leur mégalomanie, d’autant que Daniels manie très bien l’art de la provocation visuelle… C’est anxiogène, moite, et pour peu qu’on préfère la sécurité et le balisage au cinéma, on peut s’épargner l’expérience. Pourtant, rares sont les films qui proposent aux spectateurs – et à quelques comédiens à l’image polie – de les plonger de manière si extrême dans une certaine idée de l’horreur. Dans son étrange tourbillon de vulgarité (payante, évidemment), c’est un film élégant et captivant.

De Lee Daniels. Avec Zac Efron, Matthew McConaughey, Nicole Kidman. États-Unis. 1h48. Sortie le 17 octobre

Note de la rédaction : 

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