Les héros de la littérature jeunesse de Gabrielle Vincent se voient réinventés au cinéma dans une belle fable sociale, où l’humanisme s’unit à la tendresse.
Les tribulations d’Ernest et Célestine, un ours grognon et une souris malicieuse, ont préparé au sommeil des milliers d’enfants tout en les incitant subtilement à ne pas céder aux sirènes du conformisme. Peut-être par peur de voir sa création uniformisée, l’auteure Gabrielle Vincent a manifesté de son vivant sa farouche opposition à la transposition de son œuvre à la télévision ou au cinéma. Collaborateur de longue date de Michel Ocelot et partenaire financier sur l’extraordinaire BRENDAN ET LE SECRET DE KELLS, le producteur Didier Brunner lui offre aujourd’hui la plus belle des trahisons. Le miracle d’ERNEST & CÉLESTINE est de n’adapter aucun des livres mais d’en restituer toute leur substantifique moelle, sur le fond comme sur la forme. Le choix de confier le scénario à Daniel Pennac, écrivain culte et caméléon de « La Fée Carabine », est indéniablement brillant. La plume chargée de conscience sociale se met au service d’un récit du commencement, centré sur la rencontre de l’ursidé bougon et du muridé rêveur. Pennac développe un univers dans lequel l’environnement urbain des ours coexiste avec celui des souris en sous-sol. Une souris ne se lie pas d’amitié avec un ours, assène-t-on à Célestine. Mais cette dernière n’est pas du genre à croire aveuglément tout ce qu’on lui raconte. À travers ce long apprivoisement entre Ernest et Célestine, le spectateur assiste à la renaissance d’une forme de tendresse « Chaplinesque » qui n’est pas sans rappeler THE KID. Aussi, les perles dialoguées que Pennac place dans la bouche des héros sont magnifiées par la facture visuelle exceptionnelle de Benjamin Renner. Respectueux de l’univers graphique de Gabrielle Vincent (rappelant celui de Beatrix Potter), le cinéaste affirme un penchant délectable pour la légèreté du crayonné et la délicatesse de l’aquarelle. Ce qui aurait semblé être une gageure à animer se révèle ici prodigieux de fraîcheur et de spontanéité. Cette naïveté stylistique n’atténue en aucun cas un propos universel sur la tolérance et l’originalité créatrice. ERNEST & CÉLESTINE justifie pleinement l’engouement qu’il suscite lors de ses présentations en festivals et figure déjà parmi les joyaux de cette année 2012 finissante.
De Benjamin Renner, Vincent Patar et Stéphane Aubier. Avec les voix de Lambert Wilson, Pauline Brunner et Féodor Atkine. France. 1h19 Sortie le 12 décembre
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