Cannes 2013 : GATSBY LE MAGNIFIQUE / Critique

15-05-2013 - 14:30 - Par

De Baz Luhrmann. Sélection officielle, hors compétition, ouverture.


Synopsis (officiel) : Printemps 1922. L’époque est propice au relâchement des moeurs, à l’essor du jazz et à l’enrichissement des contrebandiers d’alcool… Apprenti écrivain, Nick Carraway quitte la région du Middle-West pour s’installer à New York. Voulant sa part du rêve américain, il vit désormais entouré d’un mystérieux millionnaire, Jay Gatsby, qui s’étourdit en fêtes mondaines, et de sa cousine Daisy et de son mari volage, Tom Buchanan, issu de sang noble. C’est ainsi que Nick se retrouve au coeur du monde fascinant des milliardaires, de leurs illusions, de leurs amours et de leurs mensonges. Témoin privilégié de son temps, il se met à écrire une histoire où se mêlent des amours impossibles, des rêves d’absolu et des tragédies ravageuses et, chemin faisant, nous tend un miroir où se reflètent notre époque moderne et ses combats.

Quel réalisateur mieux placé que Baz Luhrmann pour réadapter à l’écran le roman « Gatsby le Magnifique », brûlot sur la vacuité des parvenus et roman d’amour bouleversant ? L’Australien filme le romantisme comme personne, et a un penchant naturel pour l’image opulente. Alors son GATSBY est riche visuellement, trimbalant sa caméra de jardins verdoyants en salons rococo, un objectif qui capture avec convoitise et envie les toilettes clinquantes des dames des cercles sociaux en vue. Une profusion de diamants, de tissus rares, de maquillage, de breloques et de bijoux jusqu’à en dégueuler et c’est justement le sujet : derrière ces décors dégoulinants de pognon, il n’y a rien. Luhrmann assume le mauvais goût général de ses images, les transformant en une foire inhumaine et insouciante, puisque tel est justement l’environnement dans lequel évolue Jay Gatsby, cet homme mystérieux qui organise pour ses congénères toutes les semaines, des soirées où tout est permis. Au fond, se cache un homme diablement seul, accroché à l’ostentation et espérant ainsi séduire à nouveau l’amour de sa vie qu’il a laissé il y a cinq ans, et qui, depuis, s’est mariée à un héritier blindé. GATSBY va doucement creuser vers le cœur de la personnalité de son héros, pour essayer d’atteindre une authenticité révélant la solitude et le malaise des sociétés matérialistes. Malheureusement, Luhrmann est plus fasciné par le potentiel visuel des signes extérieurs de richesse que par le cœur de son histoire, et ne fait jamais évoluer sa direction artistique au gré de son discours. À peine se contente-t-il de vaguement adapter le ton de l’omniprésente musique (affreux megamix de tubes revisités) à l’humeur du film. Jamais il n’atteindra la sobriété formelle nécessaire pour répondre au délitement progressif des apparences. Jamais il ne sacrifiera son film de nouveau riche afin d’appuyer le discours sévère contre l’illusion du capitalisme. Jamais il ne fera une croix sur les excès pour en faire la critique. Derrière cette enivrante valse à l’esthétique radicale et très audacieuse, au style foncièrement à part (des spectacles comme GATSBY on n’en voit pas deux dans l’année) et aux prestations qui forcent l’admiration (plus particulièrement, celle de Leonardo DiCaprio), il n’y a qu’une histoire d’amour terriblement émouvante, mais guère plus. Le discours social n’étant qu’une coquetterie. Ce qui est un comble.

De Baz Luhrmann. Avec Leonardo DiCaprio, Carey Mulligan, Tobey Maguire. États-Unis. 2h22. Sortie le 15 mai

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