Cannes 2013 : FRUITVALE STATION / Critique

16-05-2013 - 22:40 - Par

De Ryan Coogler. Sélection officielle, Un Certain Regard.


Synopsis (officiel) : Le 1er janvier 2009 au matin, Oscar Grant, 22 ans, croise des agents de police dans la station de métro Fruitvale, San Francisco. Cette rencontre va transformer un inconnu en fait divers. Le film raconte les vingt quatre heures qui ont précédé cette rencontre.

FRUITVALE STATION a les défauts inhérents à son statut : premier film, il est encore le reflet d’un souci de propreté, avec un scénario bien sous tous rapports, sans zones d’ombre dans ses lignes de dialogues, obsédé par la clarté de chaque intention, trop passionné. Tiré d’une histoire vraie, il est engoncé dans le respect de son sujet et cherche vaille que vaille à satisfaire ceux qui ont vécu ce fait divers dramatique aux premières loges, au détriment d’un récit efficace. Puisque Ryan Coogler le montre dès les premières minutes via une vidéo enregistrée à l’époque du drame et qu’il ne compte pas créer de faux suspense, ce n’est pas déflorer le film de dire qu’Oscar, 22 ans, a été abattu d’une balle dans le dos, sur un quai de métro, alors qu’il était immobilisé à terre, par l’un des flics qui contrôlaient son groupe d’amis après une altercation avec une bande rivale. Lui qui, après avoir purgé une peine de prison, cherchait à se racheter auprès de sa petite amie, de sa fille et de sa mère. C’est sur cette tentative de rédemption que le film s’attarde en partie, en le suivant de crise de conscience en errance déprimée, cherchant à échapper à son passé. D’autant plus poignant que l’on sait immédiatement que sa quête est vaine, que la fin sera tragique. Mais là où un réalisateur plus expérimenté aurait laissé, une fois Oscar abattu, le spectateur en état de choc – ce qui aurait totalement souligné la dimension injuste de cette mort –, Coogler s’appesantit sur l’après, sur les larmes, sur les deuils (Octavia Spencer n’excelle d’ailleurs pas dans le rôle de la mère courage). FRUITVALE STATION a du pathos à revendre. Mais, il y a toujours un « mais ». Coogler a pris le soin de ne pas jouer la posture esthétique du film indé (malgré une production calibrée pour Sundance) et a opté pour une forme simple et maîtrisée. C’est d’autant plus flagrant lorsqu’intervient la scène fatidique de l’arrestation, où sa caméra nerveuse crée une tension des plus concrètes, sans vouloir jouer la carte documentariste. Le deuxième gros atout de FRUITVALE STATION, c’est l’énergie dégagée par ses jeunes acteurs, du premier au dernier rôle, qui emporte littéralement le film. (En tête, on citera la toujours impeccable Melonie Diaz (LES SEIGNEURS DE DOGTOWN, SOYEZ SYMPAS, REMBOBINEZ) et le prodigieux Michael B. Jordan, dont le capital sympathie crève le plafond et dont l’art de cristalliser une certaine Amérique (celle d’une classe prolétaire honnête et aimable) relève d’une grande rareté et presque du mystère.

De Ryan Coogler. Avec Michael B. Jordan, Melonie Diaz, Chad Michael Murray. États-Unis. 1h25. Prochainement

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