THE BAY : chronique

19-06-2013 - 09:13 - Par

Pour sa première incursion dans le found footage, Barry Levinson impose le respect par sa maîtrise des multiples mécanismes de la peur.

Le sous-genre fantastico-horrifique du faux documentaire composé d’images soi-disant retrouvées mystérieusement – le found footage – a connu un regain de popularité ces dernières années. Quoi de plus normal au vu de la formidable rentabilité qu’il peut générer avec une promo inventive et un investissement financier riquiqui. Cette formule, à l’origine du phénoménal carton du PROJET BLAIR WITCH en 1999, Oren Peli l’a reprise telle quelle pour PARANORMAL ACTIVITY dix ans plus tard. Depuis, les clones opportunistes ne cessent de pulluler, sans imagination. Et pourtant, Barry Levinson prouve avec THE BAY à quel point elle peut être efficace, pour peu que l’on ait une vision en phase avec son époque et un vrai talent de conteur. En ces temps saturés par les moyens de communication, Levinson confectionne des images vidéo issues de smartphones, caméras de surveillance, conversations Skype, extraits de journaux télévisés, rapports vidéo d’une mission scientifique, prises de vues sous-marines, etc. Elles constituent la chair de THE BAY, chronique 2.0 d’un cataclysme écologique survenu le 4 juillet 2009 et que le gouvernement a voulu étouffer. Trois ans plus tard, Donna Thompson raconte devant sa webcam comment la couverture journalistique d’un innocent concours du plus gros mangeur de crabes a tourné au cauchemar dans une station balnéaire du Maryland. Pris de vomissements, les plaisanciers constatent des irruptions massives de bubons et de pustules, associées à une sensation d’inflammation interne toujours plus forte… comme si on les dévorait de l’intérieur. L’intention de bousculer les schémas balisés du genre est un bon point pour THE BAY. Mais la contribution d’un vieux de la vieille comme Levinson participe indéniablement à sa réussite. Car, derrière un dispositif filmique résolument moderne, le cinéaste maîtrise l’art ancestral de faire monter progressivement la tension, de diffuser au bon moment les informations clés sur l’origine de l’épidémie avant d’instiller de beaux moments de malaise et d’effroi, sans un déluge d’effets. S’il n’évite pas quelques passages convenus et une poignée de clichés, THE BAY effraie également après la séance, une fois que l’on apprend que les isopodes marins piscivores devenus incontrôlables existent véritablement et sont le fruit d’une mutation liée à la pollution humaine avérée dans la baie de Chesapeake. Dans THE BAY, Levinson célèbre la terreur plausible, la meilleure de toutes.

De Barry Levinson. Avec Kether Donohue, Stephen Kunken, Frank Deal. États-Unis. 1h24. Sortie le 19 juin

 

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