BEFORE MIDNIGHT : chronique

Le couple mythique de BEFORE SUNRISE et BEFORE SUNSET se reforme pour clore la trilogie avec une classe impériale.

« Ça faisait longtemps qu’on s’était pas baladé en racontant des conneries », lance Jesse (Ethan Hawke) à Céline (Julie Delpy) au milieu de BEFORE MIDNIGHT. Neuf ans, plus exactement. Après le lumineux BEFORE SUNRISE, parangon de ce que le cinéma indépendant livrait de plus exaltant durant les 90’s, le réalisateur Richard Linklater et ses acteurs s’étaient retrouvés en 2004 pour le tout aussi emballant BEFORE SUNSET. Une suite conclue par un cliffhanger intenable : Jesse avait-il raté son avion, était-il resté à Paris avec Céline, au détriment de son épouse et de son fils ? Près d’une décennie plus tard, voilà enfin la réponse : en couple et parents de jumelles, l’Américain et la Française passent l’été en Grèce. Alors qu’ils semblent s’aimer comme à leur première rencontre, de graves dissensions naissent dans leur couple. Au terme de cette journée cruciale, seront-ils parvenus à les surmonter ? Les amateurs des deux premiers volets seront ici parachutés en terrain connu : longues et immersives scènes dialoguées, festival de plans- séquences, discussions sur l’existence, l’amour, la littérature, le quotidien… BEFORE MIDNIGHT, s’il ne cherche jamais à réinventer la formule développée par ses prédécesseurs, ne cale pas pour autant ce troisième volet sur des rails balisés. Moins romantique et plus pragmatique, BEFORE MIDNIGHT s’ouvre à des thèmes plus sombres, bouscule les certitudes de Jesse et Céline – une nouvelle fois campés avec une spontanéité désarmante par Delpy et Hawke. Désormais quadragénaires, ils confrontent leurs flamboyants espoirs de jeunesse et, pour avancer, doivent faire le bilan du chemin parcouru, s’accommoder de leurs réussites et de leurs échecs. Le scénario décortique cette problématique avec une finesse remarquable, aborde chaque nœud dramatique avec une honnêteté de ton rare, dépeint la vie de couple avec une crudité naturaliste salvatrice. De scènes tendres ou tendues en dialogues profonds et saillies drolatiques, le film dresse un portrait humain – car dépouillé de tout pathos et de tout clinquant hollywoodien factice – de ce couple universel. Tout juste pourra-t-on reprocher à BEFORE MIDNIGHT ses personnages secondaires en forme d’alibis ou de contre- propositions maladroites aux débats qui animent Jesse et Céline. Rien qui ne vienne toutefois entacher la réussite indéniable qu’est ce vibrant dernier (?) volet d’une saga mémorable.

De Richard Linklater. Avec Julie Delpy, Ethan Hawke, Panos Koronis. États-Unis. 1h48. Sortie le 26 juin