WOLVERINE – LE COMBAT DE L’IMMORTEL : chronique

19-07-2013 - 16:58 - Par

James Mangold offre à Wolverine un écrin de choix qui, par ses ambitions anti-spectaculaires, dénote dans le paysage du blockbuster hollywoodien actuel.

Du bestiaire de la trilogie X-MEN, Wolverine était sorti chouchou du grand public. En trois films à peine, l’anti-héros Marvel avait conquis la planète cinéma grâce à son magnétisme fascinant, son animalité laid back et l’interprétation sans faille de Hugh Jackman. Mais la trilogie, en faisant trop souvent de Wolverine un pourvoyeur de bons mots ou de coolitude, oubliait parfois un peu vite la densité psychologique du personnage et ses atours barbares qui, dans le comic, en faisaient le X-Men le moins recommandable, mais aussi le plus passionnant. Un survol nécessaire, Wolvie étant dans les trois films inséré, voire noyé, dans une multitude de personnages à développer et d’arcs narratifs plus globaux. Le griffu n’avait donc pas franchement eu l’opportunité de dévoiler toutes ses facettes. Et ce n’est pas avec sa piteuse première aventure solo, X-MEN ORIGINS : WOLVERINE (2009) que les choses s’étaient arrangées.  WOLVERINE – LE COMBAT DE L’IMMORTEL change la donne. En s’inspirant de la mythique mini-série en quatre tomes signée Frank Miller et Chris Claremont (1982), qui envoie Wolverine au Japon, ce deuxième film solo partait déjà sur de très bonnes bases. Ne pas s’attendre toutefois à une transposition fidèle de matériau d’origine. Si LE COMBAT DE L’IMMORTEL reprend le décor, la situation – Wolvie parachuté dans un univers qui lui est étranger – et s’inspire directement de quelques scènes de la BD – l’introduction du tome 1, notamment –, les scénaristes Chris McQuarrie, Mark Bomback et Scott Franck réalisent ici un véritable travail d’hybridation, trahissant sans s’excuser l’œuvre de Miller / Claremont pour livrer une étude plus générale du personnage. C’est toute la beauté de ce WOLVERINE : livrer un conte initiatique avec en son centre un héros quasi immortel ayant déjà bourlingué depuis plus de deux siècles. « Vous cherchez ce que recherche tout soldat : une mort honorable, la fin de ses souffrances », lance à Wolvie Yukio, sidekick badass et particulièrement réussie (à mille lieues de la séductrice sexuée du comic). C’est ainsi un personnage en bout de course, hanté par ses proches disparus, aliéné de son propre fait, que suit LE COMBAT DE L’IMMORTEL et qui, comme tout bon héros torturé empreint de romantisme, va reprendre goût à la vie – ou du moins lui trouver un sens – en tombant amoureux. Les peines existentielles de Logan – sa haine pour ce corps monstrueux et douloureux, pour cette immortalité qui en fait un vagabond solitaire… – à peine effleurées jusqu’à présent sur grand écran sont ici au cœur du film et abordées avec tact. Si Darren Aronofsky, premier réalisateur attaché au projet, aurait sans doute fait de ce même script une œuvre plus charnelle et dérangeante, son suppléant James Mangold effectue un travail remarquable et apporte au COMBAT DE L’IMMORTEL une véritable personnalité, un sérieux non feint et un regard respectueux. Passant du wu xia pian au polar hard boiled dans une même et superbe scène d’action / poursuite, refusant un montage ultra cut ne lui ressemblant pas, filmant les combats en plans larges, jouant à merveille du format anamorphosé ou du tumulte tokyoïte pour perdre autant le héros que son public, laissant leur place aux silences et au calme bucolique, Mangold offre à Wolverine un merveilleux écrin dont l’ambition est simple : refuser le spectacle à tout prix. Ici, seuls trois ou quatre moments de bravoure parsèment le film, sans qu’ils ne sombrent jamais dans la désormais épuisante abstraction numérique. LE COMBAT DE L’IMMORTEL trébuche néanmoins sur nombre d’obstacles. La méchante Viper, déjà guère passionnante sur papier, s’avère totalement ratée et rabâche une imagerie éculée de femme fatale de foire. Le récit s’avère parfois extrêmement prévisible au point que l’une des révélations finales tombe totalement à plat. Le troisième acte, lui, oscille entre tragédie grandiose – la souffrance sacrificielle et physique du héros, poussée à son paroxysme lors de quelques plans assez iconiques – et cartoon ostentatoire. Pourtant, en dépit de ses quelques défauts, il se dégage une classe folle de cet objet filmique presque anachronique. Car WOLVERINE – LE COMBAT DE L’IMMORTEL captive avant tout pour sa gravité émotionnelle (de chaque dialogue, chaque combat), remarquablement portée par un Hugh Jackman que l’on croit à chaque instant près de l’explosion. Mieux : certaines scènes – la vision de Nagasaki dévastée, la miséricorde de Logan envers un ours agonisant, le combat contre Shingen – se hissent aisément parmi les meilleures livrées cette année par le blockbuster hollywoodien.

De James Mangold. Avec Hugh Jackman, Hiroyuki Sanada, Rila Fukushima, Will Yun Lee. États-Unis. 2h09. Sortie le 24 juillet.

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