Toronto 2013 : GRAVITY / Critique

08-09-2013 - 18:09 - Par

D’Alfonso Cuarón. Avec Sandra Bullock, George Clooney. Special presentations.


Pitch :
Pour sa première expédition à bord d’une navette spatiale, le docteur Ryan Stone, brillante experte en ingénierie médicale, accompagne l’astronaute chevronné Matt Kowalsky (George Clooney). Mais alors qu’il s’agit apparemment d’une banale sortie dans l’espace, une catastrophe se produit. Lorsque la navette est pulvérisée, Stone et Kowalsky se retrouvent totalement seuls, livrés à eux-mêmes dans l’univers. Le silence assourdissant autour d’eux leur indique qu’ils ont perdu tout contact avec la Terre — et la moindre chance d’être sauvés. Peu à peu, ils cèdent à la panique, d’autant plus qu’à chaque respiration, ils consomment un peu plus les quelques réserves d’oxygène qu’il leur reste. Mais c’est peut-être en s’enfonçant plus loin encore dans l’immensité terrifiante de l’espace qu’ils trouveront le moyen de rentrer sur Terre…

Dans l’espace, la vie est impossible. Voilà ce que martèle l’ouverture de GRAVITY dans un rapide carton d’information. Pourtant, le cœur même du film va contredire totalement cette affirmation : la principale qualité du nouveau projet d’Alfonso Cuarón est justement d’être une œuvre vivante, vibrante, où les émotions fortes se succèdent à un tempo infernal. Alors qu’ils effectuent une sortie dans l’espace pour procéder à une expérimentation technique, les astronautes Matt Kowalsky (George Clooney) et Ryan Stone (Sandra Bullock) essuient les assauts destructeurs d’une nuée de débris. À partir de là, le chaos. Cuarón recherche dès le départ l’immersion la plus totale. Il la bâtit soigneusement, en poussant l’identification du spectateur aux protagonistes par tous les moyens : plans-séquences d’une durée surréaliste et d’une incroyable maîtrise, caméras subjectives et / ou tourbillonnantes… La sensation d’être bringuebalé dans l’espace se fait si prégnante, si réaliste, que GRAVITY en devient souvent un objet de terreur totale. Mains moites, jambes flageolantes, souffle court : rarement un film aura su physiquement provoquer avec autant de force ce que les phobies les plus irraisonnées engendrent, qu’il s’agisse du vertige, de la claustrophobie ou de l’aérodromophobie. En nous confrontant à ces peurs primales, en nous projetant dans le vide, Cuarón construit une épopée spectaculaire à la puissance cinématographique indéniable. Pourtant, le cinéaste trébuche sur quelques obstacles : l’humour qui émerge çà et là en guise de palier de décompression ne fonctionne jamais – pire, il nuit au récit –, le scénario apparaît parfois calculé au point qu’il semble accumuler arbitrairement les rebondissements dans le seul but de relancer la machine narrative. Des à-coups qui auraient rapidement pu faire de GRAVITY un film cynique et clinique ne survivant pas à son concept. Pourtant, en dépit de ces moments de flottement où sa mécanique devient par trop évidente, GRAVITY l’emporte sur un terrain où on ne l’attendait peut-être pas : l’humain. En l’occurrence Ryan Stone, campée par une remarquable Sandra Bullock. Le portrait de cette femme abîmée par la vie qui doit prendre acte de sa mortalité et se laisser aller (dans le sens psychothérapeutique du terme) pour survivre est la plus glorieuse réussite du film. Et si le spectacle qu’est GRAVITY perdra forcément de sa force en-dehors d’une salle de cinéma ou lors d’un deuxième visionnage, le parcours poignant et universel de Ryan Stone lui permettra sans aucun doute de résister aux outrages du temps.

D’Alfonso Cuarón. Avec Sandra Bullock, George Clooney. États-Unis / Grande-Bretagne. 1h33. Sortie le 23 octobre

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