NOS HÉROS SONT MORTS CE SOIR : chronique

23-10-2013 - 11:25 - Par

La révélation française de l’année a un nom : David Perrault, et son coup d’essai est un coup de cœur. À ne pas manquer.

De retour du conflit algérien, Victor (formidable Denis Ménochet) retrouve son meilleur ami Simon (Jean-Pierre Martins, impeccable). Un catcheur baptisé « Le Spectre », qui lui propose de l’accompagner sur le ring sous le masque de « L’Equarisseur de Belleville ». Hanté par des démons intérieurs (on n’en saura pas plus), Victor supporte difficilement ce statut de méchant. Leur vient alors l’idée d’intervertir leurs rôles au nez et à la barbe du public, et d’organisateurs acoquinés au milieu criminel parisien. Mais lors du match qui les oppose, les choses dérapent… Il y a dans le refus du personnage central de NOS HÉROS SONT MORTS CE SOIR d’obéir à un stéréotype donné comme la volonté du jeune réalisateur David Perrault de dicter sa propre règle du jeu. Depuis la singularité de son sujet à son casting constitué de « gueules » taillées pour l’écran en passant par son esthétisme ultra léchée, absolument tout dans ce premier essai transpire l’envie d’en découdre avec la dictature du naturalisme à la française. Et s’il démarre sur une reconstitution historique du Paris des années 60, le glissement vers une atmosphère fantomatique a très vite fait de l’en détourner. Nimbé dans un magnifique clair-obscur, NOS HÉROS SONT MORTS CE SOIR se revendique de la série B, des classiques du film noir, de sa mythologie et de ses icônes charismatiques dont les catcheurs, au crépuscule de leur gloire, seraient les derniers représentants. Ceux qui, objets de l’adulation des foules, ont connu la disgrâce sous l’influence d’une génération 68 (symboliquement prédite par l’écoute d’un disque de Serge Gainsbourg), qui, à tort ou à raison, ne voulait/ne pouvait plus rêver en s’identifiant. À la fois nostalgique dans son humeur et postmoderne dans sa constitution, NOS HÉROS SONT MORTS CE SOIR s’impose comme un film de genre transversal, interrogeant sa place dans un paysage cinématographique encore trop conditionné par les effets de la Nouvelle Vague. Sans partisannerie belliqueuse, cette proposition de cinéma, intime, pop et entière, défend simplement un esprit de liberté (diablement communicatif), à peine freiné par quelques digressions hasardeuses dans le récit. Rien qui ne remettra en question les capacités d’un cinéaste naissant, plein de promesses, sur lequel on est prêt à miser gros pour les prochaines années.

De David Perrault. Avec Denis Ménochet, Jean-Pierre Martins, Constance Dollé. France. 1h37. Sortie le 23 octobre

 

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