Cannes 2014 : DRAGONS 2 / Critique

16-05-2014 - 13:41 - Par

De Dean DeBlois. Sélection officielle, hors compétition.

Synopsis officiel : La vie s’écoule paisiblement sur l’île de Beurk. Astrid, Rustik le Morveux, Varek, Kranedur et Kognedur se défient lors de courses sportives de dragons devenues très populaires tandis qu’Harold et Krokmou, désormais inséparables, parcourent les cieux à la conquête de territoires inconnus et de nouveaux mondes. 
Au cours de l’une de leurs aventures, ils découvrent une grotte secrète qui abrite des centaines de dragons sauvages, protégés par un mystérieux dragonnier. 
Harold et Krokmou vont alors se retrouver au centre d’une lutte visant à maintenir la paix et vont devoir défendre leurs valeurs pour préserver le destin des vikings et des dragons.

« Depuis que les Vikings chevauchent des dragons, le monde est devenu plus vaste. » Cette phrase lancée par Harold dans la scène introductive de DRAGONS 2 ne s’applique pas qu’aux habitants de Beurk, mais également à DreamWorks Animation même. Depuis 2010 et la sortie de DRAGONS, l’aplomb et la diversité des projets du studio n’ont plus de limites. DRAGONS 2 se dévoile donc aujourd’hui avec la lourde tâche de ne pas décevoir. Le risque ? Viser plus haut, plus fort, plus grand et, dans la surenchère, perdre de vue le cœur de DRAGONS : la pureté de ses intentions, son classicisme, l’honnêteté brutale de ses émotions. Cette perspective semble handicaper le début du film : Dean DeBlois, maître assuré de la franchise – il est ici seul au scénario et à la réalisation, ce qui n’était pas le cas pour le premier volet –, peine à se fixer sur une ligne claire. Pendant quelques minutes, DRAGONS 2 semble flotter, hésiter. Puis DeBlois fixe enfin sa caméra sur Harold et Krokmou, en symbiose, dans une séquence aérienne dont la beauté fantasmatique suscite un émerveillement indicible. Suivront encore quelques légers errements, vite balayés par les enjeux posés par le cinéaste : la quête identitaire d’Harold passera par la rencontre avec un mystérieux dragonnier, la découverte d’une grotte abritant des dragons sauvages et la confrontation avec un fantôme venant du passé de son père Stoik. DRAGONS 2 emboîte alors une variété étourdissante de nœuds dramatiques, de personnages secondaires traités avec soin, de punchlines hilarantes, de gags d’arrière-cadre, de plans ahurissants d’inventivité, de purs moments de grâce ou de batailles épiques. Le tout saupoudré d’un véritable festival de « mignonitude » de Krokmou. Qu’il étudie la noblesse de cœur de Stoik, oubliant vingt ans de solitude par amour ; qu’il crée un superbe personnage féminin aussi complexe que moderne ; qu’il dissèque une relation père / fils gangrénée par la peur qu’a chacun de décevoir l’autre ; qu’il fasse de DRAGONS 2 une parabole sur la démocratie ‘lincolnienne’ – « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple » – ou une allégorie sur les délires de leaders bellicistes, Dean DeBlois affiche ici une maîtrise sidérante. Si bien qu’à force de foisonner, DRAGONS 2 affiche un rythme parfois trop soutenu, là où certaines scènes mériteraient de prendre davantage leur temps. Mais le propre des grands films est de transcender leurs défauts et DRAGONS 2 y parvient via l’intensité des émotions qu’il suscite. Le film ne donne pas simplement le sentiment terrible que tout peut y arriver à tout instant : il ne plie devant aucune difficulté, aucun sacrifice, aucun trauma infligé à ses personnages. Il se permet toutes les audaces. Et surtout celle de vouloir faire pleurer des adultes. Car outre les événements tragiques que DeBlois met en scène avec une gravité dévastatrice, il atteint également un certain degré d’abstraction : ses images – deux dragons se faisant face dans les airs, Harold se laissant tomber dans les cieux, notamment – déploient une telle puissance intrinsèque et viscérale qu’elles n’ont presque plus besoin de narration pour bouleverser. Sans doute parce que DRAGONS 2, expérience pure de cinéma, se nourrit des ambitions d’un réalisateur dont l’absence totale de cynisme ou de calcul transpire à chaque seconde de l’écran.

De Dean DeBlois. Avec les voix originales de Jay Baruchel, Cate Blanchett, Gerard Butler, Jonah Hill, Kristen Wiig. États-Unis. 1h45. Sortie le 2 juillet.

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.