Cannes 2014 : COLD IN JULY / Critique

19-05-2014 - 14:00 - Par

De Jim Mickle. Quinzaine des Réalisateurs.

Synopsis officiel : 1989. Texas. Une nuit, Richard Dane abat un homme qui vient de pénétrer dans sa maison. Alors qu’il est considéré comme un héros par les habitants de sa petite ville, Richard est malgré lui entraîné dans un monde de corruption et de violence.

Un an après y avoir présenté WE ARE WHAT WE ARE, Jim Mickle revient à la Quinzaine des Réalisateurs pour dévoiler COLD IN JULY, adapté du roman « Juillet de Sang » de Joe R. Lansdale. Tout comme son prédécesseur, qui mélangeait ambiance redneck pesante et horreur gore plus classique, COLD IN JULY a l’ambition d’hybrider les genres – lesquels ? Laissons la surprise. Du coup, Mickle évite de baliser le terrain et préfère privilégier l’incertitude via ruptures de ton déconcertantes ou revirements surprenants. Ce foisonnement, s’il est aussi le plus gros défaut du film – il nuit à sa cohérence narrative et stylistique –, assure néanmoins sa capacité à faire évoluer le regard porté sur les personnages et le décor qui les entoure. Le portrait qu’il fait ainsi d’une certaine Amérique sudiste – qui conclut ses messages de répondeur par un « Dieu vous bénisse ! », qui glorifie celui qui aura défendu son foyer dans le sang et où des « putes latinos sans papier [peuvent bien disparaître], tout le monde s’en fout » – entre immédiatement en conflit avec ce qu’est Richard Dane (Michael C. Hall) au début du récit. Un homme simple et timide, qui détient l’arme de son père mais n’en a jamais fait usage, qui confie « avoir failli chier dans son froc » quand il a tiré sur l’étranger ayant pénétré dans sa maison. Et surtout, qui assure « se sentir merdique » et « ne pas être fier » de son geste d’auto défense. Dès lors, Mickle va disséquer la progression de Richard, la façon dont le sang appelle le sang, dont son geste inaugural ouvre en lui des portes insoupçonnées jusqu’alors, crée des désirs de violence toujours plus marqués, une grande soif de justice – aussi mal placée soit-elle – et une certaine défiance envers l’autorité – surtout lorsqu’elle est corrompue. Entre le premier plan du film sur Richard, dans son lit, terrifié d’entendre un bruit suspect dans son salon et la toute dernière scène de COLD IN JULY, qui le replace dans le même lit, ce n’est pas simplement de l’eau qui a coulé sous les ponts, mais littéralement des seaux entiers de sang que l’on a déversés dans les toilettes avant de tirer la chasse. En usant de protagonistes à la psychologie stéréotypée – outre Dane, on trouve le croque mitaine à la figure patriarcale Ben Russel (Sam Shepard) et le cowboy texan typique aussi drôle que revêche Jim Bob (Don Johnson) – Jim Mickle ancre COLD IN JULY dans une sorte de non réalisme assumé, où s’accordent esthétisme de la violence et propos rentre-dedans. D’aucuns verront dans ce COLD IN JULY une œuvre moralement tendancieuse. Mickle, s’il joue clairement sur cette ligne morale – notamment dans le tout dernier plan –, laisse le spectateur décider : le cinéaste assène-t-il une vérité premier degré ou au contraire, observe-t-il l’évolution de Richard Dane avec une grande ironie ?

De Jim Mickle. Avec Michael C. Hall, Sam Shepard, Don Johnson, Vinessa Shaw. États-Unis. 1h49. Prochainement.

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