LA PLANÈTE DES SINGES : L’AFFRONTEMENT : chronique

30-07-2014 - 11:04 - Par

Aussi sophistiqué dans son propos sociopolitique que techniquement bluffant, LA PLANÈTE DES SINGES : L’AFFRONTEMENT restera sans doute comme l’un des meilleurs blockbusters de l’année.

LA PLANÈTE DES SINGES : LES ORIGINES était l’une des seules grosses productions modernes de studio (la Fox) à rester mesurée en termes de spectacle. Le film préférait parier sur le pouvoir hypnotique de ses quelques images choc (les attaques de singes, en gros) et la portée inouïe de son sentimentalisme rappelant le poignant PROJET X de Jonathan Kaplan (1987). Il était nécessaire que L’AFFRONTEMENT soit plus impressionnant pour s’imposer comme une franchise-phare de l’époque. Et bien qu’on n’ait pas eu la larme à l’œil de tout le film (contrairement à son prédécesseur qui nous fait chouiner à tous les coups), cette suite est d’une efficacité absolument redoutable. Tout commence par l’harmonie régnant chez la communauté de primates qui, en dix ans, ont appris à communiquer en signant et, pour le cas des plus « évolués », en parlant. Ce calme va être mis à mal par l’arrivée surréaliste d’un groupe d’hommes et de femmes, survivants du rétrovirus ALZ- 113, cherchant à rallumer la centrale électrique locale. Problème, le bâtiment est sur le territoire des singes. Si César est diplomate, ses congénères n’ont pas vraiment un bon souvenir de l’être humain. Patriarche, César va jouer la carte de la réconciliation en pactisant avec Malcolm, émissaire autoproclamé de la partie adverse (Jason Clarke). Mais dans chaque camp, le consensus déplaît. La peur panique de l’inconnu, le passif douloureux et la haine vont surgir. De l’étude désenchantée du leadership aux dérives des révolutions (desquelles l’extrémisme profite parfois), L’AFFRONTEMENT dresse un portrait radical mais très pertinent de ce qu’est le chaos social post-révolution. Film sur le langage et la communication, mais aussi brûlot sur l’effet pervers de la démocratisation des armes à feu, ce nouveau volet va encore plus loin que LES ORIGINES quand il faut mettre l’Homme face à sa propre violence et à sa faculté toute singulière de s’éliminer lui- même. Et quitte à faire une grande tragédie, autant y inclure les passages obligés : les intrigants, les trahisons, les « coups d’état »… Matt Reeves a insufflé à son film une grandiloquence étrange, passant par de très solennels dialogues, une gravité oppressante, un sentiment de désolation bouleversant. Avec un scénario très simple (voire classique) et des sentiments complexes, Reeves parle de tous les conflits, de tous les actes fratricides, de toutes les tentatives avortées de paix. Il a extrait son histoire hors du temps. C’est pourquoi formellement, il se permet quelques audaces : parfois, sans avoir l’air d’y toucher, il rend hommage aux maquillages originaux – et somme toute pittoresques – de John Chambers ; d’autres fois, au détour d’un plan où un singe, défiguré et démantibulé par la haine, attaque sur fond de flammes de l’enfer, survient la réminiscence de l’effroi provoqué par les vieux films fantastiques ; enfin, alors que les primates surveillent les hommes du sommet d’un immeuble en ruines, comme des Indiens épieraient des cowboys du haut d’une falaise, un vieil air malicieux rappelant Lalo Schifrin retentit (ce dernier a d’ailleurs travaillé sur la série LA PLANÈTE DES SINGES en 1974). Mais ne vous y trompez pas, sous ses airs spectaculaires, voire ludiques, L’AFFRONTEMENT, entre film politique et film d’épouvante, fait régner la terreur.

De Matt Reeves. Avec Jason Clarke, Andy Serkis, Gary Oldman. États-Unis. 2h. Sortie le 30 juillet

 

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