Toronto 2014 : THE RIOT CLUB / Critique

06-09-2014 - 18:06 - Par

Une chronique sans concession de la jeune haute société anglaise qui convainc plus par la construction de sa narration que par son propos même.

Adapté de la pièce à succès « Posh » de Laura Wade – qui signe ici le scénario –, THE RIOT CLUB suit deux étudiants, Miles (Max Irons) et Alistair (Sam Claflin) qui, après une courte initiation rejoignent une société secrète séculaire de l’université d’Oxford dévouée à embrasser la débauch, d’en faire un art spirituel, le Riot Club. Outre son impressionnante distribution de jeunes comédiens anglais (outre Irons et Claflin, citons Douglas Booth, Freddie Fox ou Olly Alexander), THE RIOT CLUB brille non pas tant par ce qu’il a à dire que par la façon dont il le dit. Avec un charme ironique typiquement anglais, le récit s’ancre tout d’abord dans une tonalité rigolarde et pince-sans-rire, où les fratboys du Riot Club apparaissent dans tous leurs ‘gentils’ excès – du genre à donner une voiture de luxe à une association parce qu’elle a été souillée de vomi. Bien décidés à profiter de l’université, qu’ils considèrent comme le dernier instant de leur existence où ils pourront « lâcher la bride sans que personne ne regarde », ces jeunes élites destinées à diriger le Royaume-Uni (le monde ?) parce que bien nées apparaissent gentiment risibles. Le script de Wade et la mise en scène de Lone Scherfig jouent à merveille d’une certaine légèreté inconséquente : ces beaux garçons au sang quasi royal et aux portefeuilles bien pleins ont beau boire plus que de raison, multiplier les aventures amoureuses et traîner leur nonchalance avec grandiloquence, jamais ils ne sont stigmatisés pour vouloir faire ce que toute jeune personne désire : s’amuser, brûler la vie par les deux bouts. C’est là que la malice de THE RIOT CLUB se révèle. Car si le spectateur n’est jamais vraiment dupe quant à la vraie nature de ces enfants gâtés, arrogants et incapables d’assumer la moindre de leur faute, le film ne le laisse que tout d’abord vaguement entrevoir. Sans ciller, Wade et Scherfig parviennent à rendre les membres du Riot Club appréciables, en infusant une certaine dose de caricature dans leur portrait, avant de subitement faire tomber leur masque. Et les rendre profondément détestables, monstrueux et effrayants. Chacun de leur acte devient une humiliation d’autrui et, de drôlement inoffensifs, les garçons se muent en force destructrice, tels des Gremlins incontrôlables. Une mécanique narrative qui rappelle finalement celle du LOUP DE WALL STREET : rendre le Diable sympathique pour mieux révéler ensuite son vrai visage et les atours glaçants et dérangeants de la séduction qu’il opère. Après cette montée en puissance à laquelle on se laisse prendre avec une certaine jubilation de spectateur, THE RIOT CLUB peine davantage, comme s’il avait tout donné dans ce processus de travestissement / révélation soudaine de la vérité. Le troisième acte se révèle donc plus convenu et rappelle que non, le propos de THE RIOT CLUB sur les rapports de classe ou la décence morale n’a rien de surprenant ou de fondamental. Pourtant, ce n’est pas tant cette fin décevante qui reste en mémoire, mais bien la malice avec laquelle le film sait surmonter ses faiblesses.

De Lone Scherfig. Avec Sam Claflin, Douglas Booth, Max Irons. Grande-Bretagne. 1h46. Sortie le 31 décembre

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