Toronto 2014 : HYENA / Critique

07-09-2014 - 21:00 - Par

Un thriller policier anglais qui confond nervosité et grandiloquence, et qui finit par être totalement étouffé par ses (imposantes) influences.

Quatre hommes, identifiés comme des policiers, entrent au ralenti dans une boîte de nuit interlope. Sur une musique étrangement fascinante, ils jouent de leurs matraques et de leurs poings pour détruire les lieux et tabasser le personnel. Menottes, saisies de drogue. Le quatuor se retrouve bientôt au pub du coin pour fêter ça entre lignes de coke et shots de whisky. Sont-ils de faux flics ou de vrais ripoux ? Dans l’art de l’introduction, HYENA fait fort : sa première séquence saisit immédiatement, intrigue, dérange et laisse entrevoir le meilleur. Surtout que la demi heure qui suit est à l’avenant. Score bruitiste oppressant et compressant sons de sirènes, de moteurs ou de larsen, tueries d’une rare brutalité, caméra perpétuellement en mouvements : tout est fait pour perdre le spectateur, lui dévoiler les enjeux par touches impressionnistes, comme s’il se retrouvait lui-même dans l’esprit torturé de ces flics dansant sur une ligne morale plus que douteuse et changeante. Le tout baigné dans une imagerie fleurant bon le Ken Loach urbain, avec barres d’immeubles typiquement anglaises, accents à couper au couteau et pubs délabrés où de vieux visages à qui on ne la fait pas se pintent en silence. Mais lorsque le puzzle se met en place, lorsque les tenants et aboutissants narratifs de HYENA se dévoilent, l’édifice perd rapidement de sa superbe et de son intérêt. Les méchants se font très méchants, sans aucune subtilité : ici, les Albanais – devenus la cible préférés des scripts mettant en scène la ‘nouvelle criminalité européenne’ – sont des bêtes sanguinaires taciturnes sans la moindre substance psychologique. Le réalisateur Gerard Johnson accumule les scènes inutiles et complaisantes – un viol sur une jeune femme prisonnière de la traite des blanches – dans une sorte de catalogue du pire. Certes, les ‘gentils’ étant eux aussi de sacrés salopards, le récit met tout le monde dos à dos : mais mettre en parallèle des malfrats se badigeonnant le torse de sang et des flics défoncés s’étalant du ketchup sur le poitrail n’a rien d’une analyse fulgurante… Avec sa grandiloquence peu maîtrisée et vite irritante, HYENA finit par apparaître comme un trip faussement psyché, une exagération digne d’un Olivier Marchal remonté à bloc et possédé par l’esprit diablotin de Nicolas Winding Refn. Avec sa photographie ‘néon’ et ses chansons pop décalées, HYENA s’affiche en effet trop lourdement inspiré par les films du cinéaste danois – surtout PUSHER et BRONSON – sans toutefois en avoir la puissance émotionnelle et narrative. « Parce qu’ils bossent bien, ces flics se croient intouchables. Mais c’est fini les 80’s ! », lance un agent de la police des polices. Une réplique fort à propos : en alignant les références d’un passé récent sans parvenir à les digérer, HYENA semble avoir quinze ans de retard.

De Gerard Johnson. Avec Peter Ferdinando, Stephen Graham, Neil Maskell. Royaume-Uni. 1h50. PROCHAINEMENT

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