SIN CITY : J’AI TUÉ POUR ELLE : chronique

17-09-2014 - 10:20 - Par

Neuf ans séparent SIN CITY et sa suite. Le temps de rendre l’univers de Frank Miller et Robert Rodriguez complètement dépassé.

En 2005, SIN CITY était un projet d’avant-garde qui – à l’instar de l’oublié CAPTAIN SKY ET LE MONDE DE DEMAIN – prophétisait un cinéma hautement technologique, hybride, où l’acteur serait au service d’un univers virtuel et hyperstylisé. Dont les prises de vue ne constitueraient que la base d’un long travail informatique. Le film était né d’un drôle de couple : Robert Rodriguez, alors réalisateur visionnaire, et Frank Miller, scénariste et dessinateur à la réputation sulfureuse, peu progressiste, aux univers nauséabonds. SIN CITY était alors un hommage ultramoderne aux films noirs, un petit objet lapidaire, agressif, qui ne s’excusait pas d’avoir un temps d’avance sur le cinéma. Quentin Tarantino avait réalisé une scène, ravi de s’associer à un film si différent. Jessica Alba était encore hot, Bruce Willis était encore cool, Mickey Rourke ressuscitait. C’était – dans le cadre du cinéma américain – un geste transgressif. Neuf ans plus tard, la donne a changé. Frank Miller a sabordé sa carrière cinématographique avec THE SPIRIT ; Rodriguez a creusé sa tombe artistique en prenant la parodie du cinéma d’exploitation trop au sérieux (MACHETE, MACHETE KILLS) ; sauf quand il donne l’impression d’en avoir quelque chose à faire comme dans LOOPER, Bruce Willis n’intéresse plus personne… Et, hélas, Josh Brolin, Joseph Gordon-Levitt et Eva Green, nouveaux venus dans cette franchise, n’ont personne pour les diriger et canaliser des énergies en équilibre fragile. D’où un certain fiasco. L’effet de surprise est émoussé, la magie n’est plus là, l’émerveillement de la découverte s’est envolé. Visuellement, l’univers de Rodriguez et Miller est sec, il n’a plus rien à offrir. Alors, parlons scénario. Dwight (J. Brolin) est appelé à la rescousse par Ava (E. Green), son ancien amour aujourd’hui esclave d’un riche et sadique homme d’affaires. Nancy (J. Alba), encore hantée par la mort de Hartigan (B. Willis), veut se venger de Roark (Powers Boothe). Johnny (J. Gordon-Levitt) gagne trop d’argent au poker et est la cible des hommes de main du Sénateur. Des histoires parallèles, dont les places respectives sont complètement déséquilibrées – un problème grave de narration plombe littéralement le film –, toutes ennuyeuses. Malgré l’aspect disparate voire incohérent du scénario, il y a une constante : la misogynie, l’ultraviolence et cette impression douteuse que Rodriguez et Miller exultent. Ce qui était sexy et hardboiled il y a neuf ans est devenu d’une vulgarité crasse. Les voix off introspectives sont aujourd’hui écrites d’une plume lourdaude. L’inspiration a laissé place à la complaisance.

De Frank Miller et Robert Rodriguez. Avec Josh Brolin, Mickey Rourke, Eva Green. États-Unis. 1h46. Sortie le 17 septembre

 

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