HORNS : chronique

01-10-2014 - 11:16 - Par

Sardonique, romantique, horrifique : HORNS joue avec les codes et permet à Daniel Radcliffe de livrer sa plus mature prestation à ce jour.

Ig Perrish (Daniel Radcliffe), accusé du meurtre de sa petite amie Merrin (Juno Temple), voit des cornes lui pousser sur le front. Désormais capable de forcer ses interlocuteurs à lui avouer leurs plus terribles secrets, il va tenter de démasquer celui ou celle qui a vraiment tué sa fiancée. Si Alexandre Aja ouvre HORNS par une citation tirée du « Paradis Perdu » de Milton dans laquelle Satan exhorte ses troupes à rejoindre la bataille – »Réveillez-vous, levez-vous ou soyez pour l’éternité déchus » –, elle sert davantage à illustrer la prise de conscience morale et spirituelle d’Ig qu’un quelconque pacte passé avec le Mal. Après tout, « le Diable n’est jamais le héros », lance un des personnages. Ainsi, si Ig ne s’érige pas contre l’injustice qui le frappe, son âme restera dans les limbes. Et tant pis si s’élever signifie pour lui sombrer dans le péché. Des enjeux dramatiques qu’Aja expose avec une efficacité redoutable dès la première séquence, une juxtaposition formellement splendide de l’avant / après la mort de Merrin, où les notes du « Heroes » de David Bowie viennent donner au visage étrangement viril de Daniel Radcliffe des airs de martyr mélancolique. Dès lors, HORNS se déroule telle une fable dont les décors vont du conte de fées à une Americana prolo d’inconscient collectif. Des images d’Epinal qu’Aja sculpte à son gré pour donner à son film une identité bien plus marquée. On retrouve en effet l’esprit joueur du cinéaste – déjà mis à profit dans PIRANHAS – mixant farce et cruauté, ironie et premier degré. La quête d’Ig Perrish, allant du burlesque au franchement tragique, permet alors au réalisateur de bâtir un film hybride, classique dans sa facture (narration carrée, flash-back informatifs…) mais surprenant dans sa manière d’aligner des scènes dont on sait rarement ce qu’il va en ressortir. Là résident de véritables émotions fortes: l’amour d’Ig pour Merrin vibre à l’écran –Radcliffe livre une prestation remarquable –, la rage de sa quête vengeresse donne lieu à de gracieux moments d’horreur… Malheureusement, cette fascinante mécanique s’enraye dans le dernier acte. Tirant sur la longueur, le récit bégaie et Aja, comme s’il ne faisait pas confiance au lyrisme de son sujet, en dit trop, explique trop. Les révélations deviennent plus prévisibles, l’humour sardonique disparaît, le pouvoir d’Ig se fait moins symbolique et les parallèles religieux plus didactiques. Mais en dépit de cette perte de vitesse, HORNS reste hautement recommandable et rappelle qu’Alexandre Aja demeure l’un des auteurs français dont le style est le plus assumé et dont l’audace est la moins feinte.

D’Alexandre Aja. Avec Daniel Radcliffe, Juno Temple, Kelli Garner. États-Unis / Canada. 2h03. Sortie le 1er octobre

 

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