LE HOBBIT – LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES : chronique

09-12-2014 - 12:41 - Par

Totalement schizophrène, oscillant de l’épique au bancal, trop long mais pas assez dense, le troisième volet du HOBBIT peine à convaincre pleinement.

Maintenant que la trilogie LE HOBBIT est complète, les comparaisons avec son aînée du SEIGNEUR DES ANNEAUX seront inévitables. Et gageons qu’elles seront indéniablement en défaveur des aventures de Bilbon Sacquet. Après UN VOYAGE INATTENDU ennuyeux et dépourvu d’enjeux, puis une DÉSOLATION DE SMAUG rectifiant le tir en affichant un élan narratif plus marqué, Peter Jackson met fin à sa trilogie avec LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES. Un dernier volet qui, à bien des égards, se révèle malade : tous les problèmes parasitant les deux précédents films arrivent ici à maturation. Bien sûr, LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES recèle de quelques fantastiques joyaux, comme seuls les cinéastes de la trempe de Jackson sont capables d’offrir. Lui qui a rendu palpable l’existence de la Terre du Milieu avec LE SEIGNEUR DES ANNEAUX n’a pas perdu totalement la main et, même si l’on ressent ici moins de passion, il parvient encore à délivrer quelques grands moments de cinéma – un combat impliquant Elrond et Saroumane –, d’émotion – la toute première scène entre Baïn et son père, les relations entre Tauriel et Kili ou entre Bilbon et Thorin – ou de complicité avec le spectateur – Legolas, figure héroïque toujours aussi fascinante et ambiguë. De même, on se réjouit de voir le formidable Martin Freeman être enfin mis en avant – il était temps. Sa performance, subtil mélange de bravoure, de mélancolie et d’abnégation, endeuille LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES et baigne le film dans une touchante atmosphère de fin de règne. Le tout parsemé de quelques grands moments épiques où le talent de Jackson en termes de découpages et de maîtrise de l’espace continue d’ébahir. Pourtant, impossible d’être totalement satisfait par cette BATAILLE DES CINQ ARMÉES. La raison ? L’incapacité de Jackson à maîtriser sa narration. Personnages inutiles et insupportables (le pleutre Alfrid, caution rigolarde mais irritante), prestations à la limite du grotesque (Cate Blanchett, encore plus cabotine que dans LA COMMUNAUTÉ DE L’ANNEAU), arcs narratifs au traitement rebattu (la descente dans la folie de Thorin) : LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES s’avère trop souvent approximatif. Jusque dans son propos plus que léger – asséné avec redondance par plusieurs dialogues très didactiques – sur le pouvoir corrupteur du pouvoir et de l’argent. LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES souffre d’un défaut d’écriture patent, conséquence des erreurs commises dès UN VOYAGE INATTENDU : incapable d’offrir à chacun de ses protagonistes une vraie profondeur, comment Jackson pourrait-il bien rendre leur destin – parfois funeste – pleinement engageant ? Bancal, LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES l’est jusque dans la volonté du cinéaste de faire du HOBBIT un pont vers LE SEIGNEUR DES ANNEAUX : il tire sa trilogie vers le bas avec des clins d’œil inutiles voire franchement maladroits mais parvient à retomber sur ses pattes lors d’un final aérien et poignant, tout en délicatesse. Au final, cet « à peu près » permanent trouve une illustration parfaite dans le flottement qui caractérise la narration : le rythme de LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES est erratique et le film trop long alors même que le récit apparaît incomplet, comme amputé de transitions ou de scène indispensables. D’aucuns rappelleront que Peter Jackson livrera une version longue de LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES en DVD/Blu-ray – agrémentée de 30 minutes supplémentaires. Mais doit-on juger un film sur ce qu’il aurait pu être si le montage avait été complet ? Non. D’autant que LA BATAILLE DES CINQ ARMÉES ne dure « que » 2h24, là où ses deux prédécesseurs tiraient allègrement jusqu’à 2h45. Ou que LE RETOUR DU ROI s’épanouissait sur 3h20…

De Peter Jackson. Avec Martin Freeman, Ian McKellen, Richard Armitage. États-Unis / Nouvelle-Zélande. 2h24. Sortie le 10 décembre

 

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