VINCENT N’A PAS D’ÉCAILLES : chronique

18-02-2015 - 10:26 - Par

Surprise ! Un film de super-héros, tout ce qu’il y a de plus français, préférant forcément l’audace à la débauche visuelle.

Dire que VINCENT N’A PAS D’ÉCAILLES est un film de super-héros pourrait laisser entendre qu’il est commercial et mainstream, hyper technologique, qu’il tente de rivaliser avec la mode américaine actuelle ou, pire, qu’il est opportuniste. Or, il n’est rien de tout cela. Il est même l’antithèse de cela. Il s’ancre profondément dans le cinéma français, avec ses petits moyens et sa mise en scène a minima. On est dans le film d’auteur, plein de tics, de plans fixes, de panoramiques classiques, de travellings sommaires, de silences empruntés. Le charme opère pourtant totalement. Et son humour discret fait mouche. Beaucoup de dialogues sont réduits à des interjections, à des phrases sujet-verbe-complément lancées sans réponse – « Bon, ben… C’est super… » soupire un personnage pour tuer le temps. Le réalisateur Thomas Salavador (qui tient aussi le rôle principal) met à nu le film de super-héros et en présente une version dans son plus simple appareil. Vincent s’est installé dans une région de lacs, car lorsqu’il est dans l’eau ou simplement mouillé, ses forces sont décuplées. Pour ne pas révéler son secret, il la joue discrète. Un peu rêveur, il est aussi lymphatique et a une tendance à se désociabiliser forcément. Un jour, il tombe amoureux et, décomplexé, use de son super-pouvoir en public… Le début de la cabale. VINCENT N’A PAS D’ÉCAILLES est créé exactement sur le squelette thématique du comic book movie, de la solitude du super-héros à la peur qu’il provoque chez les Hommes, des responsabilités qui lui incombent à la transcendance de sa personnalité naturelle. Tout effet spécial est d’un naturel bluffant, tout le canevas déconstruit devient alors évident. On y trouve même une course- poursuite entre Vincent et la police, à pied, dans les rues du village, totalement antispectaculaire mais haletante, un sidekick sympa et un hommage au baiser de Spider-Man et Mary Jane. Le film démystifie le genre pour l’ancrer dans un hyperréalisme (moins celui d’un Christopher Nolan que d’un Alain Guiraudie) presque cocasse. Normal alors de voir la belle de Vincent le bombarder de questions naïves sur la portée de son pouvoir. La séquence a non seulement le mérite d’être drôle, mais elle met aussi le film à hauteur de mortel, en jouant avec toutes les interrogations d’un spectateur incrédule face à la dimension surnaturelle du super-héros. VINCENT N’A PAS D’ÉCAILLES n’a aucune vocation à montrer que la France peut faire du comic book movie. Il revendique au contraire sa singularité, son côté artisanal. Pourtant, il est souvent aussi épatant que généreux.

De Thomas Salvador. Avec Thomas Salvador, Vimala Pons, Youssef Hajdi. France. 1h18. Sortie le 18 février

 

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