Cannes 2015 : LE TRÉSOR / Critique

22-05-2015 - 08:08 - Par

De Corneliu Porumboiu. Sélection officielle, Un Certain Regard.

Pitch : Costi est un comptable âgé de 33 ans. Il passe son temps entre son travail et des soirées tranquilles en famille, pendant lesquelles il lit des contes à son fils de 5 ans. Parfois, Costi s’imagine lui-même dans le rôle des héros. Un soir, alors qu’il est en train de lire « Robin des Bois », il est interrompu par son voisin Adrian. Celui-ci lui demande de lui prêter de l’argent. Il a des dettes énormes à la banque et est sur le point de perdre son appartement. Il a besoin de cet argent pour louer un détecteur de métaux et prospecter le jardin de ses grands-parents, dans lequel il est persuadé qu’un trésor est enterré. Si Costi paie pour le détecteur et s’ils trouvent le trésor, ils le partageront moitié-moitié. Costi et sa femme commencent par être sceptiques, mais ils se prennent vite au jeu et commencent à faire des projets avec l’argent qu’ils gagneront après avoir vendu le trésor. Alors que cette tentative de trouver le trésor semble vouée à l’échec et qu’Adrian est sur le point de renoncer, Costi ne se laisse pas décourager. Aux yeux de sa femme et de son fils, c’est un héros. Et les héros ont l’habitude d’obtenir ce qu’ils veulent…

Avec son apparent désir de romanesque, LE TRÉSOR, nouvelle réalisation de Corneliu Porumboiu avait sur le papier tout pour séduire. Sauf que, cette année, le cinéma roumain n’est définitivement pas à la fête à Cannes. Après la profonde déception suscitée par L’ÉTAGE DU DESSOUS de Radu Muntean, LE TRÉSOR continue d’entériner les faiblesses patentes d’un cinéma se reposant en trop grande partie sur un naturalisme vain. Alors que son héros et son voisin sont en quête d’un trésor, Porumboiu est incapable d’insuffler à son film le moindre souffle, la moindre excitation, le moindre plaisir enfantin. Tout juste sombre-t-il dans l’ironie, le comique de répétition (combien de fois vont-ils scanner le sol du jardin, au juste ?) ou des répliques humoristiques tombant le plus souvent à plat. Tout comme pour L’ÉTAGE DU DESSOUS, on pourra toujours décoder LE TRÉSOR comme un héritier névrosé de la Roumanie ‘ceausescienne’, comme une allégorie sur une certaine quête de sens, une quête d’un passé perdu, introuvable même en sondant avec insistance. LE TRÉSOR rappelle même que ce genre de quête aurait été un crime aux yeux des communistes – un crime de fainéants refusant le travail destiné au fonctionnement du régime. Sauf que Porumboiu peine à faire vivre son propos puisqu’il ne parvient jamais à capter son public. La faute à un dénuement stylistique total, à une absence profondément gênante de mise en scène – on serait même tenté de dire, une absence de cinéma. Constitué en grande partie de longues scènes en plans fixes de dialogues entre personnages dont la teneur n’a rien de fondamental ou de foncièrement intéressant, LE TRÉSOR déroule une photo terne, une réalisation sans personnalité et totalement fonctionnelle, un découpage passe-partout. Certes, LE TRÉSOR se termine sur une scène qui regorge de romanesque, d’élan et de poésie. Mais cette conclusion, aussi formidable soit-elle, ne justifie pas les 90 minutes précédentes. L’histoire du TRÉSOR aurait sans aucun doute engendré un excellent court-métrage. En l’état, il n’est qu’un long-métrage étirant son récit à l’extrême sans aucune raison narrative ou plastique.

De Corneliu Porumboiu. Avec Toma Cuzin, Adrian Pucarescu, Ana Maria Stegaru. Roumanie. 1h30. Prochainement

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