Cannes 2015 : MIA MADRE / Critique

17-05-2015 - 23:45 - Par

De Nanni Moretti. Sélection officielle, en compétition.


Pitch : Margherita est une réalisatrice en plein tournage d’un film dont le rôle principal est tenu par un célèbre acteur américain.
À ses questionnements d’artiste engagée, se mêlent des angoisses d’ordre privé : sa mère est à l’hôpital, sa fille en pleine crise d’adolescence. Et son frère, quant à lui, se montre comme toujours irréprochable… Margherita parviendra-t-elle à se sentir à la hauteur, dans son travail comme dans sa famille ?

Plus qu’un habitué du festival, Nanni Moretti est devenu une véritable mascotte. Chacun de ses films passés par la Croisette a conquis le public avec ce mélange de légèreté et d’engagement qui font le charme de son œuvre. Mais c’est seulement lorsqu’il ouvre les vannes lacrymales du mélo pudique avec LA CHAMBRE DU FILS qu’il obtient la palme espérée. C’est peu dire donc que son nouveau film, MIA MADRE, centré autour de la fin de vie, a été guetté par tout le monde. Moretti palme double ? Pas pour nous. Si le film est loin d’être désagréable, difficile pourtant de crier au génie. Cinéaste du dialogue et de l’empathie, Moretti tourne ici un peu au système. Alternant scènes de comédie sur un tournage catastrophe et scènes dramatiques sur la mort prochaine de la mère de la réalisatrice, le film pousse la « tragi-comédie » jusqu’au point « la vie c’est drôle, la vie c’est triste »! Soit un patchwork de séquences uniquement conçues pour s’annuler l’une l’autre. Étrangement écrit, le récit navigue sans cesse d’un film à l’autre en nous demandant évidemment d’y voir une forme « ouverte sur la vie », un mélange d’émotions qui serait l’apanage d’un cinéma vraiment humain. Problème : en refusant de construire son film sur un personnage antipathique, Moretti adoucit en permanence la comédie satirique sur le monde du cinéma avec une bonne dose de drama. Son héroïne en pleine crise en devient inconsistante. On croit un temps avoir affaire à un personnage détestable, une sorte d’auto-satire du réalisateur au féminin. Mais Moretti n’est pas Almodovar et son film reste dans les clous du drame de chambre poli. Souffrant du sempiternel syndrome du film « Bambi » (tout film où l’on crie MAMAN ! pour émouvoir), MIA MADRE échoue à provoquer une émotion sincère tant la petite fabrique de Moretti dévoile bien trop vite ses intentions. Dommage, il y a par moments de jolies scènes de comédie avec un Turturro en roue libre certes mais « Peter Sellersien » en diable et quelques rares moments de cinéma, notamment dans les cauchemars de l’héroïne. Quand le film sort de son réalisme un peu plat pour s’aventurer dans le bouffon ou le trouble intérieur, on serait prêt à le suivre. Mais très vite, Moretti reprend toujours sa petite leçon de vie trop calibrée. On voulait être ému, touché, on s’est juste poliment ennuyé.

De Nanni Moretti. Avec Nanni Moretti, Marguerita Buy, John Turturro. Italie. 1h47. Sortie le 23 décembre 2015

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