Cannes 2015 : LE LENDEMAIN / Critique

22-05-2015 - 15:17 - Par

De Magnus von Horn. Quinzaine des Réalisateurs.

Pitch : Lorsque John retourne chez son père après avoir purgé sa peine de prison, il aspire à prendre un nouveau départ. Mais son crime reste présent dans les mémoires des habitants de la commune et semble impardonnable. Son retour attise la colère de chacun et lentement s’installe une atmosphère pesante qui laisse présager un lynchage imminent. Se sentant abandonné par ses amis et ceux qu’il aime, John perd espoir et l’agressivité qui l’avait conduit en prison refait peu à peu surface. Devant l’impossibilité d’oublier son passé, il décide de l’affronter.

Le cinéma distant, dépassionné et pourtant profondément humain provenant de Scandinavie a encore frappé à Cannes. À la Quinzaine des réalisateurs, plus exactement. Magnus Von Horn, Suédois coproduit par la Pologne, nous met LE LENDEMAIN en pleine gueule. Raide et à bonne distance, la caméra souvent fixe s’attache à John, gamin pas très aimable. Il sort de prison, après deux ans de peine, et revient chez lui, là où le méfait a eu lieu, et ce malgré les craintes de son père. Il pensait avoir payé sa dette et la naïveté de sa jeunesse l’incitait à croire à un nouveau départ. C’est mal connaître les gens du cru, plus particulièrement ceux de son âge, pétris de jugements. Avoir tué fait de John un punching-ball social et le condamne à être à son tour une victime sans droit de réponse. « Je ne veux pas être seul » dit-il à sa seule amie, pour justifier sa passivité. Déchirant. Mais pour éviter le drame pathos, pour donner encore plus de nuances à ce camaïeu cafardeux de gris, Von Horn laisser planer le doute sur la nature profonde de John. Son acte était-il isolé, voire accidentel, ou ce jeune homme est-il intrinsèquement violent ? Nul ne le sait et peut-être même pas le cinéaste. La communauté effrayée le condamne donc à errer, les bras ballants, en quête de normalité. Entre beauté scandinave et tête à claque, Ulrich Munther, interprète de John et acteur peu expérimenté (quoique chanteur assez reconnu dans son pays, la Suède), déroule un réel talent – et il en faut – pour incarner l’apathie et susciter autant d’empathie que de haine. Lorsque John apparaît tuméfié et monstrueux, alors LE LENDEMAIN interroge la société et l’accable pour avoir créé ses propres démons frankensteiniens. C’est un film noir et mal aimable certes, mais qui remplit, sans complaisance, son rôle d’objecteur de conscience.

De Magnus von Horn. Avec Ulrik Munther, Mats Blomgren, Loa Ek, Wieslaw Komasa. Suède. 1h42. Prochainement

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