Toronto 2015 : DEMOLITION / Critique

17-09-2015 - 13:29 - Par

Toronto 2015 : DEMOLITION / Critique

Le talent de Jake Gyllenhaal, ici encore éclatant, ne suffit pas à rendre DEMOLITION totalement convaincant.

Troisième film américain en trois ans pour le cinéaste québécois Jean-Marc Vallée et nouveau véhicule à acteur. Après Matthew McConaughey dans DALLAS BUYERS CLUB et Reese Witherspoon dans WILD, il dirige cette fois Jake Gyllenhaal, décidément toujours aussi prompt à se jeter dans de nouveaux défis, de nouvelles collaborations. Ici, il campe Davis Mitchell, jeune loup de la finance qui perd son épouse. Incapable d’extérioriser son chagrin, il formalise son deuil en mettant sa vie sens dessus dessous. Étrange, instable et rebelle, il se met à démonter les objets du quotidien ou à littéralement détruire ses possessions matérielles. On comprend ce qui a pu attirer Vallée dans DEMOLITION, lui qui aime tant se pencher sur des personnages en crise, à la croisée des chemins et en quête de sens. Son Davis n’est d’ailleurs pas si loin des protagonistes de ses deux derniers films et Vallée lui applique le même traitement, avec une certaine urgence de mise en scène. Suspendue à l’évolution de son deuil, l’existence de Davis est ainsi captée par une caméra à l’épaule tremblotante du plus bel effet. Vallée y ajoute son cocktail habituel de chansons pop cool et saupoudre le tout de quelques très belles idées – notamment la scène d’ouverture ou encore un plan où la foule recule au ralenti quand Davis avance à vitesse normale. Si Jake Gyllenhaal livre une prestation humaine et habitée, si le lien que le héros noue avec un adolescent en crise (excellent Judah Lewis) intéresse et si l’on trouve même un certain plaisir à voir Davis détruire son univers à coup de masse, DEMOLITION n’est au final que peu convaincant globalement. Tiré vers le bas par quelques tics narratifs gênants – une narration en voix off poussive bien loin de celle très réussie de WILD – et une tendance à la symbolisation à outrance, DEMOLITION fait partie de ces films indépendants où la bizarrerie s’avère au final bien sage, bien contenue dans une zone de normalité indéniable. La relation qu’entretient Davis avec le personnage de Naomi Watts, passionnante sur le papier car platonique, est sous-exploitée. Le film finit enfin par déraper dans le sur drame dans son dernier acte – des révélations en forme de deus ex machina accablant le personnage et ayant « l’avantage » de faire avancer brutalement son voyage psychologique. Un travers qui définit bien DEMOLITION : le film prouve parfois sa justesse avec talent et ne manque pas de qualités. Mais il semble néanmoins souvent trop préparé et pensé pour séduire, presque calculé. Difficile, dans ces conditions, d’être viscéralement et sincèrement ému.

De Jean-Marc Vallée. Avec Jake Gyllenhaal, Naomi Watts, Chris Cooper. États-Unis. 1h40. Prochainement

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