Né du chaos, ce western féminin affiche de belles qualités d’interprétation et quelques failles narratives.
Au printemps 2013, le tournage de JANE GOT A GUN démarrait sous la houlette de Lynne Ramsay (WE NEED TO TALK ABOUT KEVIN) mais la réalisatrice… n’est jamais venue, laissant son équipe et sa distribution en plan. Désaccords sur l’écriture du script, tensions avec les producteurs… Ce départ inopiné lançait une valse des comédiens attachés au film. Si Natalie Portman, productrice et actrice principale, et Joel Edgerton restaient les indéboulonnables pièces maîtresses du casting (l’Australien a cependant changé de rôle, passant du « méchant » au « héros »), autour d’eux se sont succédés Michael Fassbender (parti lorsque la cinéaste a déserté), Jude Law et Bradley Cooper, finalement remplacés par Ewan McGregor. Le tout, rappelons-le, alors que les prises de vues étaient suspendues à l’arrivée, derrière la caméra, d’un bon samaritain qui voudrait bien prendre les rênes au débotté d’un long- métrage à 15 millions de dollars. Gavin O’Connor (WARRIOR), qui s’est dévoué, parviendrait-il à faire le western féministe envisagé par Natalie Portman et Lynne Ramsay ? Le chaos duquel le film est né se verrait-il à l’écran ? JANE GOT A GUN arrive à nous deux ans et demi plus tard comme une très belle surprise. 1871, Nouveau-Mexique : Jane voit son mari Bill Hammond (Noah Emmerich), un célèbre hors-la-loi, revenir au foyer ensanglanté, criblé de balles. Il prévient : les Bishop les ont retrouvés et ils arrivent. Bill étant hors d’état de se battre, Jane part demander de l’aide à Dan (Edgerton), son ancien fiancé. En attendant l’attaque, les deux reviennent sur le passé, au moment crucial où la guerre les a séparés. Si la relation délitée de Jane et Dan est le cœur du film, le récit pèche par ses flashbacks, lancés en fondu par des regards pensifs. Il a probablement fallu retravailler en urgence un script jamais livré par Ramsay, mais cette facilité narrative plonge le film dans la niaiserie. D’autant plus dommageable que, par ailleurs, JANE GOT A GUN manie habilement des sentiments durs et violents. Ce western intime, qui préfère la sobriété à l’épopée, raconte la condition féminine à la fin du XIXe siècle, quand les femmes étaient à la merci des hommes, les meilleurs comme les pires. Jane, personnage meurtri et résilient, est l’héroïne d’un très joli film sur la survie et sur les sacrifices qu’elle exige. Mais l’atout du film, c’est bien la partition bouleversante de Joel Edgerton, jamais aussi bon acteur que lorsqu’il est dirigé par Gavin O’Connor. Un rôle qui lui a échu un peu dans la panique. Mais une preuve que finalement JANE GOT A GUN a vraiment bien tourné.
De Gavin O’Connor. Avec Natalie Portman, Joel Edgerton, Ewan McGregor. États-Unis. 1h37. Sortie le 27 janvier
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