Cannes 2016 : LE CLIENT / Critique

21-05-2016 - 17:06 - Par

Cannes 2016 : LE CLIENT

D’Asghar Farhadi. Sélection officielle, En Compétition.

Synopsis (officiel) : Contraints de quitter leur appartement du centre de Téhéran en raison d’importants travaux menaçant l’immeuble, Emad et Rana emménagent dans un nouveau logement. Un incident en rapport avec l’ancienne locataire va bouleverser la vie du jeune couple.

Avec des films comme LES ENFANTS DE BELLE VILLE, À PROPOS D’ELLY ou UNE SÉPARATION, Asghar Farhadi a été l’un des artisans d’un certain renouveau du cinéma iranien. Loin des Makhmalbaf et Kiarostami, guère grand public, les films de Farhadi font preuve d’une générosité indéniable – doublée d’une grande rigueur narrative et visuelle. Après un passage (réussi) en France avec LE PASSÉ, Farhadi retrouve l’Iran pour LE CLIENT. Un couple doit évacuer son immeuble qui menace de s’effondrer – une scène captée en un plan séquence urgent et redoutable de tension. Emad et Rana sont relogés par un ami. Un soir, alors que Rana croit ouvrir la porte à son époux, elle tombe sur un autre homme… Tout comme Yuri Bykov dans L’IDIOT, Asghar Farhadi use de la figure de l’immeuble branlant sur sa base. Si le cinéaste russe en faisait le symbole d’un état rongé par la corruption et une bureaucratie kafkaïenne, le réalisateur iranien s’en sert comme représentation d’une fissure morale. Mais laquelle ? C’est tout l’intérêt du CLIENT, qui interroge à la fois la psyché d’un mari aimant (un peu trop ?), d’une épouse blessée et de toute une société hypocritement ultraconservatrice. Construit avec soin, notamment dans sa manière d’utiliser la pièce « Mort d’un commis voyageur » comme miroir ou commentaire, le scénario du CLIENT prouve une nouvelle fois la rigueur d’écriture de Farhadi, ainsi que sa capacité à mettre sur pied un ‘petit théâtre de la vie’ – comme le suggèrent les plans d’ouverture et de conclusion. Le cinéaste dissèque avec minutie la peur et le trauma, tout comme le puritanisme, qu’il attaque via l’extrême sentiment de honte ressenti par Emad. Pourtant, si la construction du CLIENT est quasi inattaquable, le film n’a pas l’évidence limpide de certains des précédents opus de Farhadi. On comprend son intention, mais il pousse parfois le curseur des enjeux dans la zone rouge, quitte à les rendre poussifs et moins universels. C’est notamment le cas dans le dernier acte où, à force de vouloir rendre son récit plus percutant, Asghar Farhadi finit par étirer sa conclusion jusqu’à l’effusion gênante.

D’Asghar Farhadi. Avec Shahab Hosseini, Taraneh Alidousti, Babak Karimi. Iran. 2h05. Sortie le 2 novembre

 

 

 

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.