Cannes 2016 : TWO LOVERS AND A BEAR / Critique

18-05-2016 - 15:01 - Par

Cannes 2016 : TWO LOVERS AND A BEAR

De Kim Nguyen. Quinzaine des Réalisateurs.

Synopsis : Dans le Grand Nord, près du Pôle Nord. Dans une ville moderne où 200 âmes vivent difficilement par -50°C et où les routes ne mènent nulle part. Dans ce décor lunaire, Lucy et Roman, deux jeunes tourmentés, tombent amoureux. Mais les fantômes du passé de Lucy ressurgissent et elle doit fuir. Ensemble, les deux amants décident de faire un saut dans le vide. Un saut dans la vie.

C’est l’histoire de deux jeunes adultes métaphoriquement opposés. Roman (Dane DeHaan) transporte les morts pour le coroner. Lucy (Tatiana Maslany) les vivants en faisant le taxi. Lui ne souhaite pas déménager, elle va bientôt être obligée de le faire – et ainsi de le quitter. Ils partagent tout de même quelque chose d’essentiel : avoir chacun, dans leur jeunesse, traversé une souffrance qui les a poussés à s’exiler dans le Grand Nord. En se penchant sur le quotidien embrumé de ces deux âmes en peine incapables de faire avancer leur existence, le cinéaste québécois Kim Nguyen s’intéresse au difficile travail de résilience. Si quelques-uns des effets de TWO LOVERS AND A BEAR sont largement prévisibles – comme la trame concernant l’homme qui traque Lucy – et laissent une légère impression d’écriture générique, le film rectifie sa trajectoire grâce à la justesse des émotions qu’il expose et à l’atmosphère plutôt singulière qu’il propose. Il dirige de main de maître son duo d’acteurs – Maslany et DeHaan livrent des prestations denses et habitées, sans être démonstratives –, et fait preuve d’un vrai sens visuel pour les isoler face aux éléments et au monde qui les entoure. Son utilisation du Scope pour capturer les étendues glacées et neigeuses s’avère d’ailleurs plutôt convaincante. Mais le plus touchant dans TWO LOVERS AND A BEAR est sans doute l’étrangeté et l’humour que Nguyen y infuse. Ici, on peut parler à un ours polaire sans que cela soit expliqué – et pourtant, cela ferait presque sens. Par ce biais détourné, Nguyen désamorce le pathos et injecte une grande tendresse dans son récit, bien que le film aborde des sujets tragiques et des questionnements existentiels lourds et casse-gueule – sommes-nous tous voués à nous noyer dans le flot de la vie comme ces rênes coincés dans une marée trop haute ? Et si les saillies plus légères détonent dans ce qui reste un sombre mélodrame sur un couple cherchant à guérir pour pouvoir s’aimer, TWO LOVERS AND A BEAR reste tenu. Bien qu’il semble partir dans diverses directions, jamais le film ne s’effondre. C’est sans doute ce qui le rend parfois surprenant et souvent séduisant.

De Kim Nguyen. Avec Dane DeHaan, Tatiana Maslany. Canada. 1h36. Prochainement

 

 

 

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