Cannes 2016 : CLOSE ENCOUNTERS WITH VILMOS ZSIGMOND / Critique

13-05-2016 - 20:30 - Par

Cannes 2016 : CLOSE ENCOUNTERS WITH VILMOS ZSIGMOND / Critique

De Pierre Filmon. Sélection officielle, Cannes Classics.

Il a travaillé avec Robert Altman (JOHN MCCABE, LE PRIVÉ), Steven Spielberg (SUGARLAND EXPRESS, RENCONTRES DU TROISIÈME TYPE), John Boorman (DÉLIVRANCE), Jerry Schatzberg (L’ÉPOUVANTAIL), Brian De Palma (OBSESSION, BLOW OUT) ou encore Michael Cimino (VOYAGE AU BOUT DE L’ENFER, LA PORTE DU PARADIS) : comme le souligne le court texte qui ouvre le documentaire de Pierre Filmon, le cinéma américain des années 1970 n’aurait pas été le même sans le directeur de la photographie hongrois Vilmos Zsigmond, décédé en janvier dernier. C’est donc cet homme de l’ombre, vénéré des cinéphiles mais peu connu du très grand public, que CLOSE ENCOUNTERS WITH VILMOS ZSIGMOND célèbre. En une séquence introductive, Pierre Filmon saisit avec malice la personnalité de Zsigmond – que nous avions eu la chance de rencontrer l’an dernier –, toute en précision et en élégance, exemple touchant d’une main de fer dans un gant de velours. Entouré par l’équipe du documentaire qui lui est consacré, Zsigmond donne son avis sur le cadre et la lumière – chef op’ un jour, chef op’ toujours. L’air de rien, ces présentations ont un véritable sens narratif pour le spectateur : il se voit invité dans les coulisses, derrière le voile trompeur de l’écran et ainsi projeté dans l’art du chef opérateur, sa vision. Pierre Filmon crée un cérémonial autour de son sujet, il transmet avec vigueur l’aura de l’homme, pour mieux disséquer ensuite l’importance de l’artiste. Là où nombre de documentaires misent tout sur l’anecdote et l’accumulation de petites histoires – il y en a des formidables ici aussi, tout comme des témoignages captivants –, CLOSE ENCOUNTERS WITH VILMOS ZSIGMOND a le grand mérite de ne pas s’en contenter. Il revient bien sûr sur la jeunesse en Hongrie de Zsigmond, sur son exil et ses débuts à Hollywood, il retrace son ascension et offre au directeur de la photographie l’opportunité de revisiter son histoire. Mais le film s’évertue également à explorer le style et les techniques du chef opérateur – comme le « flashage » de la pellicule, exposition de la bobine à la lumière avant de tourner. Refusant le plus souvent la caméra portée, cherchant un « réalisme poétique », Vilmos Zsigmond souhaitait avant toute chose l’accord parfait entre l’esthétique et le sujet d’un film. « Cela ne sert à rien de faire de trop belles images », si celles-ci détonent, explique-t-il. Cette sagesse n’empêche pas la virtuosité, comme le démontre la meilleure séquence du documentaire, dans laquelle Peter Fonda analyse longuement comment Zsigmond a mis en boîte la toute dernière scène, prodigieuse, de L’HOMME SANS FRONTIÈRE. Cette fenêtre sur le travail du directeur de la photographie a beau être érudite, elle demeure profondément accessible, généreuse et humaine. Humble, aussi, comme savait l’être Vilmos lui-même. Pour s’en convaincre, il faut voir cet homme de 85 ans se dire hanté de ne pas avoir remercié Steven Spielberg dans son discours d’acceptation de l’Oscar de la meilleure photo pour RENCONTRES DU TROISIÈME TYPE. Un détail à l’image de l’homme et de ce documentaire indispensable.

 

 

 

 

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