En dépit de quelques atouts – dont un duo d’actrices fantastiques – MORGANE trébuche là où son homologue EX_MACHINA excellait.
Lee Weathers (Kate Mara), consultante en gestion de risques, se rend dans un laboratoire secret pour décider du sort de Morgane (Anya Taylor-Joy, révélée par THE WITCH), jeune femme synthétique ayant récemment fait preuve de violence. Lee se heurte aux réticences de l’équipe qui a créé Morgane et l’a éduquée pendant sept ans. Quant à Morgane, comment va-t-elle réagir à l’enquête de viabilité dont elle est l’objet ? Après le court-métrage LOOM (2012), dans lequel un technicien chargé de fabriquer de la viande comestible à partir de protéines tentait une folle expérience, Luke Scott réitère, avec MORGANE, son intérêt pour la vie artificielle et ce que son existence implique dans la naissance du sentiment humain. Malheureusement pour le jeune cinéaste, son premier long-métrage débarque après Alex Garland et son EX_MACHINA. Dense et complexe, ce dernier avançait en crabe, en invitant le spectateur sur un sol mouvant et en bâtissant une ambiance profondément étrange – voire franchement flippante dans le décalage. MORGANE, lui, évite le malaise et propose un voyage bien plus balisé. Préférant la clarté au mystère, le premier acte a ainsi tendance à surligner les enjeux à venir (« Morgan is not a she, it’s an it », dit Lee à la toute première personne qu’elle rencontre au labo) et à bâtir une froideur qui ne sert pas tant à plonger le spectateur dans l’expectative qu’à caractériser la méfiance qui anime tous les protagonistes. Si bien que tout ceci, même mû par une évidente volonté de bien faire, prend des atours maladroits et, dans ses moments les plus faibles, de course à l’épate. Trop ancré dans une atmosphère de supposée conspiration industrielle traitée classiquement (Quel est le passé de Lee ? Que veulent vraiment ses patrons ? Pourquoi ont-ils créé Morgane ?), le récit peine également à faire passer au premier plan ses enjeux humains – et par ricochet, les émotions. Pourtant, Luke Scott, dont la réalisation joue avec les visages (en juxtaposition ou en opposition), parvient parfois à susciter le trouble lors de scènes joliment tendues – la rencontre Lee/Morgane et l’examen psy. Mais ces surgissements, dans lesquels il démontre une certaine aisance à la direction d’acteurs, ne suffisent pas. Très carré, trop carré, MORGANE ne décolle jamais vraiment, engoncé qu’il est dans sa recherche du cool éthéré. Aucune surprise ne vient vraiment émailler le récit et la seule qui survient se révèle prévisible et forcée. MORGANE peut néanmoins compter sur ses deux actrices principales, Kate Mara et Anya Taylor-Joy : leurs performances, aussi physiques qu’intérieures, sauvent le film du tout-venant.
De Luke Scott. Avec Kate Mara, Anya Taylor-Joy, Boyd Holbrook. États-Unis. 1h31. Sortie le 28 septembre
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