Chroniques en vrac du 26 septembre 2018

26-09-2018 - 14:15 - Par

chroniques en vrac 26 septembre 2018

Découvrez nos critiques des films HOSTILE, L’OMBRE D’EMILY, UN PEUPLE ET SON ROI et I FEEL GOOD.

 

Hostile-600

 

HOSTILE

Le premier film de Mathieu Turi, entre film d’horreur et drame romantique. Un mélange des genres qui séduit.

Avec son héroïne battante, résistante, résiliente, HOSTILE est un film de caractère, campé sur son refus d’être étiqueté. Mathieu Turi raconte deux récits interdépendants, en parallèle. Le présent, post-apocalyptique, où Juliette (Brittany Ashworth, formidable, vue dans THE CRUCIFIXION de Xavier Gens) doit se protéger, seule dans une voiture accidentée, d’une créature qui veut sa peau ; le passé à New York, non moins douloureux mais partagé avec Jack (Grégory Fitoussi, très convaincant) un homme qu’elle va perdre. HOSTILE est en quelque sorte un double survival, le portrait d’une increvable. Cet audacieux mélange d’action et d’intime – qui veut réconcilier deux cinémas que la cinéphilie moderne a tendance à opposer – va très probablement diviser. Ce premier film révèle toutefois une grande faim et une vraie intelligence de cinéma chez son jeune réalisateur. Sa mise en scène est sobre, plus démonstrative quand le scénario s’y prête ; sa direction artistique impeccable ne trahit jamais un budget riquiqui et une production guérilla. Il y a ici et là quelques hésitations, des maladresses, l’ambition d’être un exercice de style avant d’être un film personnel. Mais l’énergie – du film, du metteur en scène – séduit et reste avec vous, longtemps après les lumières rallumées. C’est plus que bien des longs-métrages de réalisateurs confirmés évoluant dans le cinéma de genre français.

E.S.

De Mathieu Turi. Avec Brittany Ashworth, Grégory Fitoussi, Javier Botet. France. 1h23. Sortie le 26 septembre

3Etoiles

 

 

 

 

 

Emily-600

 

L’OMBRE D’EMILY

Paul Feig maîtrise le rire dans ce qu’il a de plus malaisant mais son ton étrange s’essouffle sur la longueur. 

Stephanie (Anna Kendrick), mère de famille célibataire et vlogueuse vie quotidienne, est fascinée par Emily (Blake Lively), working girl sexy, maman et épouse épanouie. Leurs fils vont à la même école, elles deviennent copines mais un jour, Emily disparaît. Dans ce bled de l’Amérique bourgeoise où les petits secrets moisissent derrière les sourires et les brushings, Paul Feig orchestre un jeu de rôles d’une grande laideur intérieure. Et les rires laissent soudain place aux grincements de dents, les chansons françaises (de Dutronc à France Gall en passant par Gainsbourg) font chic mais personne n’est dupe du manque d’élégance et de l’hypocrisie de la population. Ce simili GONE GIRL rose bonbon, d’abord très prometteur, fort de la maladresse parfois gênante et du jeu faussement adulescent d’Anna Kendrick, vire malheureusement au téléfilm M6, avec ses allusions sexuelles frigides et ses jalousies de base. Peu inspiré par un scénario cousu de fil blanc et des dialogues par trop explicatifs, Paul Feig ne fait pas de miracle à la caméra, sa réalisation étant sans souffle ni génie. Il y a bien quelque chose dans cette direction artistique, une classe indubitable. Et une volonté de mélanger le thriller et la comédie qui aurait pu rafraîchir le cinéma américain. Il y était parvenu avec la comédie d’espionnage (SPY) et la comédie policière (LES FLINGUEUSES). Mais ici, la sauce ne prend pas. 

R.P.

De Paul Feig. Avec Anna Kendrick, Blake Lively, Henry Golding. États-Unis. 1h50. Sortie le 26 septembre

2Etoiles

 

 

 

 

 

PeupleRoi-600

 

UN PEUPLE ET SON ROI

Le nouveau film de Pierre Schoeller, bien qu’ambitieux, pèche par manque de cohérence et d’harmonie. 

L’EXERCICE DE L’ÉTAT de Pierre Schoeller demeurant à ce jour l’un des films français les plus édifiants – et les mieux écrits –, on attendait sincèrement, avec beaucoup d’enthousiasme, ce que le réalisateur ferait avec la Révolution française et la Terreur. Le résultat ? Par effet de miroir et de correspondance, une charge contre le système politique d’aujourd’hui et une déconstruction en règle de la Ve République. Une ambition plus que louable, malheureusement desservie par un récit décousu, tiraillé entre les faits et les allégories, souvent réduit à des saynètes et à des effets théâtraux, comme s’il voulait encapsuler l’Histoire de France dans des tableaux, bourrés de sens, moins de romanesque. Choix conscient (et franchement contestable) de mise en scène ou charcutage par défaut en postproduction ? UN PEUPLE ET SON ROI va cahin-caha, sur fond de chants révolutionnaires mais ne va pas non plus au bout de ce procédé mélodique. Souvent subjugué par la beauté des plans, mais non moins frustré par les ruptures de tons et le défilé anecdotique de personnages connus, on se raccroche au jeu habité des comédiens, Adèle Haenel en tête. Mais subsiste l’impression désagréable que Schoeller ou ses producteurs ont hésité sans trouver le bon équilibre entre le film populaire et grand public et l’œuvre un peu plus symbolique et radicale – gymnastique à laquelle excellait par ailleurs L’EXERCICE DE L’ÉTAT.  

E.S.

De Pierre Schoeller. Avec Adèle Haenel, Gaspard Ulliel, Louis Garrel. France. 2h01. Sortie le 26 septembre

3Etoiles

 

 

 

 

 

IFeelGood-600

 

I FEEL GOOD

Kervern et Delépine continuent leur baroud social avec un nouveau venu, Jean Dujardin, bluffant en loser magnifique.

Vous connaissez aussi ce moment de ras-le-bol. Cet instant où n’importe quoi ou n’importe qui devient le bouc-émissaire de nos injustices quotidiennes et où l’on voudrait taper d’une force proportionnelle au temps passé à encaisser les coups. Mais on ne le fait pas. Gardant en nous cette rage. Qui passera de toute façon, hein. C’est dans ces occasions que le cinéma de Gustave Kervern et Benoît Delépine s’avère encore plus nécessaire que de coutume. Ne perdant rien du mordant ubuesque auquel ils nous ont habitués depuis AALTRA, le duo s’emploie à nouveau avec I FEEL GOOD à servir de catharsis à nos frustrations. Et avec style surtout. Ils retrouvent ainsi leur comparse Yolande Moreau dans le rôle de Monique, qui voit débarquer son frère, Jacques, au sein de la communauté Emmaüs qu’elle dirige. Absent depuis de nombreuses années, ce Steve Jobs de l’échec, incarné par Jean Dujardin, n’a qu’une obsession : trouver l’idée qui le rendra riche. Portrait au vitriol de notre société où le JE capital a remplacé le sens commun, I FEEL GOOD est un cri de guerre. Les cinéastes s’arment de compassion, d’humour, de dinguerie et de couleurs lumineuses, pour diffuser, au spectateur bousculé, leurs opinions, très à gauche certes, mais avant tout altruistes. Dans ce lieu de bric et de broc où les objets connaissent une nouvelle vie, Kervern et Delépine rappellent que l’humain n’est pas encore obsolète. 

P.Q.

De Benoît Delépine & Gustave Kervern. Avec Jean Dujardin, Yolande Moreau, Jean-Benoît Ugeux. France. 1h43. Sortie le 26 septembre

4Etoiles

 

 

 

 

 

 

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