BOY ERASED : chronique

26-03-2019 - 17:53 - Par

BOY ERASED : chronique

L’histoire vraie d’un jeune homme envoyé en thérapie de conversion par ses parents, devant la caméra de Joel Edgerton.

 

Huit mois séparent la sortie de COME AS YOU ARE, dans lequel une jeune fille lesbienne (Chloë Grace Moretz) était envoyée en thérapie de conversion, et BOY ERASED, où comment le fils d’un couple très croyant est confié à un établissement pour « guérir » de son homosexualité. De tels programmes prospèrent aux États-Unis depuis des années et le pays, victime d’un regain réactionnaire, tente d’exorciser certaines de ces dérives… en version cinéma indé en juillet dernier, et mieux produit aujourd’hui, avec Joel Edgerton derrière la caméra. Éduqué à l’Americana par des cinéastes comme Gavin O’Connor ou Jeff Nichols, l’Australien s’empare de l’esthétique intemporelle et l’atmosphère bigote du sud rural pour raconter l’histoire très américaine de la dévotion totale à la Bible et de la perversion des Écrits. Jared (joué par Lucas Hedges) cache son homosexualité à ses parents (Nicole Kidman et Russell Crowe) qui la considère comme une maladie. Mais « outé » contre son gré, il est envoyé à « Love in action », un établissement où Victor (Joel Edgerton) et une poignée de « soignants » forcent des ados gay à « redevenir » hétéros… par des méthodes aussi effarantes que destructrices. Il y a d’une part le témoignage d’un système malade et de l’autre le parcours d’un jeune homme qui va se battre contre le milieu dans lequel il a grandi et défier le fonctionnement mafieux et l’homophobie institutionnalisée de la communauté religieuse. Sur la foi des Mémoires de Garrard Conley dont il s’agit ici de l’adaptation, Joel Edgerton élargit le débat en dénonçant les ravages de la culpabilisation : en nourrissant la haine de soi, les préceptes intolérants n’alimentent-ils pas indirectement la violence infligée à l’autre ? C’est la question soulevée par le viol que subit Jared, une agression éclair, inattendue et ultraviolente qu’on reçoit de plein fouet et dont on sort durablement marqué. Joel Edgerton cartographie la douleur de ces jeunes et filme les beaux visages désenchantés de Xavier Dolan, Britton Sear ou Troye Sivan comme s’il les consolait. L’image toujours un peu laiteuse, les mouvements doux… Afin de ne jamais offrir en spectacle la tragédie de Jared, le film vise une sobriété qui joue finalement contre lui. Même si les moments entre Jared et sa mère émeuvent, et si le destin de ces adolescents nous affecte profondément, BOY ERASED peut devenir complaisant dans son rythme et redondant dans son message. Si bien qu’on se laisse légèrement anesthésier par ce cinéma bercé par les meilleures intentions et les rhétoriques anti-Bible Belt qu’on connaît par cœur.

De Joel Edgerton. Avec Lucas Hedges, Nicole Kidman, Russell Crowe. États-Unis. 1h55. Sortie le 27 mars

3Etoiles

 

 

 

 

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