CAPTIVE STATE : chronique

02-04-2019 - 09:49 - Par

CAPTIVE STATE : chronique

Une occupation alien observée à travers les yeux de résistants. Un peu froid émotionnellement mais très nerveux et oppressant.

 

Dans l’inconscient collectif, notamment à cause de la série télé V ou d’INDEPENDENCE DAY, l’invasion extraterrestre se devrait d’être filmée dans sa globalité. D’autres, comme notamment LA GUERRE DES MONDES de Spielberg, ont pourtant prouvé que le point de vue individuel avait de véritables vertus pour susciter l’effroi et la tension – en premier lieu parce qu’il prive le spectateur d’informations et d’explications. C’est cette démarche qu’adopte Rupert Wyatt dans CAPTIVE STATE et ce, dès la première séquence, qui installe une certaine intensité et embarque la caméra auprès d’une famille en fuite. Ce credo, Wyatt ne le lâchera pas : cloué au sol auprès de ses personnages, rivé à leur point de vue, le regard du cinéaste invisibilise les aliens autant que possible – les créatures et leurs vaisseaux n’apparaissent que lorsqu’ils ont un contact direct avec les protagonistes. Une manière, puissamment évocatrice, de flouter l’antagoniste et de projeter le spectateur dans l’inconnu. Bien que le film d’invasion alien et plus globalement les récits de résistance peuvent être régis par une mécanique attendue, Wyatt et sa scénariste Erica Beeney contournent l’écueil en construisant le récit par bribes. La mise en place des enjeux ou la caractérisation se font par petites touches, évitant ainsi au film d’être trop verbeux ou explicatif et poussant le spectateur à une découverte patiente et attentive de l’univers. Scène après scène, une vision d’ensemble prend forme, éclairant les motivations de chacun. D’autant que CAPTIVE STATE cultive une vraie proximité avec ses personnages de résistants, plaçant la caméra au beau milieu de leurs échanges, privilégiant les plans serrés aux plans d’ensemble. Le film tire toute sa nervosité de ces parti-pris, terreau d’une atmosphère urgente, parfois jusqu’à l’oppression – une scène de jeu du chat et de la souris dans une gare routière. Film-miroir de LA PLANÈTE DES SINGES : LES ORIGINES avec lequel il discute sans cesse, CAPTIVE STATE multiplie les références à l’Histoire récente – à la déportation ou à la colonisation et ses pillages de ressources, notamment – afin d’accroître encore un peu plus l’identification et l’empathie du spectateur. La multitude des protagonistes a parfois tendance à araser l’émergence d’émotion, d’autant que le traitement choisi par Wyatt, objectif et terre-à-terre, évite tout appel trop marqué aux sentiments. Mais l’expérience proposée, immersive et réflexive, construite entièrement par la mise en scène, n’en demeure pas moins assez captivante.

De Rupert Wyatt. Avec Ashton Sanders, John Goodman, Vera Farmiga. États-Unis. 1h51. Sortie le 3 avril

4Etoiles

 

 

 

 

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