Cannes 2019 : LA FAMEUSE INVASION DES OURS EN SICILE / Critique

21-05-2019 - 11:28 - Par

Cannes 2019 : LA FAMEUSE INVENTION DES OURS EN SICILE

De Lorenzo Mattotti. Sélection officielle, Un Certain Regard.

 

Synopsis officiel : Tout commence en Sicile, le jour où Tonio, le fils de Léonce, roi des ours, est enlevé par des chasseurs… Profitant de la rigueur d’un hiver qui menace son peuple de famine, le roi Léonce décide de partir à la recherche de Tonio et d’envahir la plaine où habitent les hommes. Avec l’aide de son armée et d’un magicien, il finit par retrouver Tonio et prend la tête du pays. Mais il comprendra vite que le peuple des ours n’est peut-être pas fait pour vivre au pays des hommes…

 

Après avoir participé au projet collectif PEUR(S) DU NOIR, Lorenzo Mattotti réalise son premier long d’animation en solo, LA FAMEUSE INVASION DES OURS EN SICILE, adapté d’un conte jeunesse écrit par Dino Buzzati à la fin des années 1960. Mattotti fait d’ailleurs le choix d’une animation « à l’ancienne », parti-pris commercialement à la marge et forcément intrigant artistiquement, inscrivant le film dans la lignée d’inévitables figures tutélaires comme René Laloux (LA PLANÈTE SAUVAGE) ou Paul Grimault (LE ROI ET L’OISEAU). L’esthétique est à ce titre le point fort évident de LA FAMEUSE INVASION… avec ses traits clairs, ses impressionnantes perspectives et lignes de fuite, son character design épuré et, surtout, ses superbes décors qui stylisent avec poésie et onirisme la nature majestueuse d’une Sicile fantasmée – ses montagnes escarpées, ses très vertes plaines, sa Méditerranée parfois tempétueuse, ses bords de mer ensoleillés, ses cavernes telles des cathédrales. Plein de charme, stimulant l’imagination, cet univers visuel ne permet toutefois pas au film de convaincre totalement. L’écriture, très bavarde, noie le spectateur sous les informations et les dialogues, sous une outrance peu maîtrisée qui dérive parfois vers l’hystérie. Comme si LA FAMEUSE INVASION… n’avait pas suffisamment confiance en son récit et s’agitait pour attirer l’attention. Malheureusement, l’effet inverse se produit : plus le récit se perd dans cette agitation et plus le film perd en atmosphère et en prise sur le spectateur. D’autant que le mécanisme qui régit la narration – un duo de chansonniers comédiens dell’arte raconte l’histoire – installe un filtre entre les personnages et le public. Très rapidement, une mise à distance s’effectue alors, limitant l’engagement émotionnel. Certains choix narratifs accentuent cette distanciation et notamment une certaine sagesse dans les enjeux, qui refusent les pistes trop ouvertement tragiques et irrémédiables. Si bien que les diverses allégories transportées par le récit (l’incapacité de l’homme et de la nature à cohabiter ; la difficulté, pour une population migrante, de quitter son foyer et d’en trouver un autre) perdent de leur force. Séquence après séquence, LA FAMEUSE INVASION… tente de relancer la machine – en inventant notamment une deuxième partie faisant suite à l’histoire originelle de Buzzati – mais, en dépit de ses efforts et de quelques belles idées, le film manque au final d’impact. À l’image de sa toute fin, en suspens, plus frustrante qu’évocatrice.

De Lorenzo Mattotti. Avec les voix de Leila Bekhti, Jean Claude Carrière, Beppe Chierichi. Italie / France. 1h22. Sortie le 9 octobre

 

 

 

 

 

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