Cannes 2019 : 5B / Critique

17-05-2019 - 13:07 - Par

Cannes 2019 : 5B

De Dan Krauss et Paul Haggis. Sélection officielle, Séance spéciale.

 

Synopsis officiel : Au milieu des années 1980, un simple numéro et une lettre désignaient un service au cinquième étage de l’Hôpital général de San Francisco, le premier du pays conçu spécifiquement pour traiter les patients atteints du sida. L’accent mis par les infirmiers en humanité et bien-être a été un petit miracle au milieu d’une crise dévastatrice et de panique qu’ont suivi les risques d’infections. L’histoire de 5B est racontée de façon émouvante par le témoignage des premiers patients, de leurs proches et du personnel hospitalier qui se sont portés volontaires pour travailler dans le service, un lieu doux-amer et émouvant et une page de l’histoire de San Francisco et à une célébration de héros tranquilles dignes de souvenirs et de retrouvailles.

« Cela allait au-delà du SIDA », dit un des protagonistes de 5B et peut-être toute la réussite du documentaire de Dan Krauss et Paul Haggis se retrouve encapsulée dans cette phrase d’apparence anodine. 5B lève le voile sur un sujet captivant – comment des infirmiers et des infirmières du San Francisco General Hospital ont créé au début des années 1980 la première aile médicalisée entièrement destinée à prendre soin des malades du SIDA, à une époque où personne ne connaissait rien du virus et où l’on en parlait encore comme du « cancer gay ». L’importance historique du film frappe comme une évidence. Mais au-delà de l’intérêt du sujet, 5B brille parce qu’il parvient à faire d’une histoire particulière (celle de l’aile 5B) une histoire plus générale de l’épidémie du SIDA, et d’un récit extrêmement temporalisé (de 1981 à 1988) une radiographie tout à fait intemporelle des mécanismes de la peur et de la haine. Mais aussi, en contrepoint, de la compassion et de l’espoir. À travers des images d’archives, dont certaines d’une inévitable dureté, et des témoignages à la fois factuellement ou idéologiquement précis et souvent très intimes et touchants, Dan Krauss et Paul Haggis content des histoires bouleversantes, de mort, d’amitié, d’amour, de rejet et de vie. Et là, dressent des passerelles parfois évidentes, parfois à la discrétion du spectateur, avec l’actualité. Cette haine qui prend pour alibi la peur, est-elle de retour aujourd’hui ? Ou n’a-t-elle jamais disparu et reprend désormais toute sa place à mesure qu’on laisse les craintes les plus viles s’exprimer librement à nouveau ? La cause LGBTQ est évidemment au devant de ce propos et de cette lutte constante. Mais 5B se révèle plus largement pertinent. Oui, tout cela va au-delà du SIDA. Et sans doute avons-nous une dette à ne jamais oublier envers ceux qui se sont battus, ont résisté, ont survécu, ont péri. À la fois documentaire et conte moral, 5B dépasse le statut un peu galvaudé, voire paternaliste, de « film nécessaire ». Il est une voix retentissante qui hurle dans le silence. Car si l’espoir est parfois de mise, « rien n’est fini, dit l’un des infirmiers. Je ne peux pas encore prendre ma retraite. »

De Dan Krauss et Paul Haggis. Documentaire. États-Unis. 1h33. Prochainement

 

 

 

 

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