Cannes 2019 : THE DEAD DON’T DIE / Critique

14-05-2019 - 23:38 - Par

Cannes 2019 : THE DEAD DON’T DIE

De Jim Jarmusch. Sélection officielle, Compétition.

 

Synopsis officiel : Dans la sereine petite ville de Centerville, quelque chose cloche. La lune est omniprésente dans le ciel, la lumière du jour se manifeste à des horaires imprévisibles et les animaux commencent à avoir des comportements inhabituels. Personne ne sait vraiment pourquoi. Les nouvelles sont effrayantes et les scientifiques sont inquiets. Mais personne ne pouvait prévoir l’évènement le plus étrange et dangereux qui allait s’abattre sur Centerville : THE DEAD DON’T DIE – les morts sortent de leurs tombes et s’attaquent sauvagement aux vivants pour s’en nourrir. La bataille pour la survie commence pour les habitants de la ville.

En 2013, les vampires de ONLY LOVERS LEFT ALIVE nommaient les humains « les zombies ». Des créatures peu élégantes ayant « peur de leur imagination », salissant tout ce qu’ils touchent. Une observation désespéré du monde, une errance poétique qui finissait par lorgner dangereusement vers l’amertume, voire vers la leçon de vie et de bon goût délivrée par un vieux briscard. Six ans plus tard, et après le superbe et touchant éloge de la banalité qu’était PATTERSON, Jim Jarmusch se prend à nouveau les pieds dans le tapis du genre avec THE DEAD DON’T DIE où, ô surprise, les zombies sont de retour. Cette fois littéralement. Beaucoup moins stylisé que ONLY LOVERS LEFT ALIVE, voire étrangement vidé de tout sens esthétique, THE DEAD DON’T DIE enfonce le clou et présente l’humanité comme morte-vivante, incapable de se révolter contre les importants défis de son temps – politiques, écologiques –, préférant plonger tête baissée dans le trivial. Bien évidemment, le film vit d’une réaction épidermique de Jarmusch à l’état actuel du monde et de l’Amérique – avec des mentions très directes, certaines pataudes et rebattues, à Trump, à son administration de la fake news, au discrédit permanent de toute expertise scientifique. Mais réaction épidermique et bonnes intentions ne sont rien sans un minimum de rigueur. Or, rarement aura-t-on vu Jim Jarmusch à ce point en roue libre. Sur le ton badin de la bouffonnerie apathique qui se fantasme en grande vérité subversive, THE DEAD DON’T DIE et son rythme erratique rappelle que le rire est toujours une question de timing. Entre humour adolescent et vannes (trop) faciles, THE DEAD DON’T DIE tente la référence à la pop culture et le délire méta mais tout semble forcé et inutile. On aimerait que le propos vienne sauver la face de ce spectacle bancal mais il ne fait malheureusement que l’enterrer. Quarante ans après que Romero s’est, dans ZOMBIE, servi du mort-vivant et d’une poignée de survivants réfugiés dans un centre commercial comme d’une métaphore d’un consumérisme devenu fou, Jim Jarmusch n’a tout bonnement… rien de plus à dire. Le propos ayant toujours du sens aujourd’hui, pourquoi pas. Reste que la manière interloque : le message est tout d’abord asséné dans une scène rigolarde à la désinvolture irritante, puis réexpliqué par le menu dans une voix off finale. Dénoncer la stupidité du monde – y compris celle du spectateur –, noble mission. Qui ne devrait toutefois souffrir d’aucune paresse.

De Jim Jarmusch. Avec Bill Murray, Adam Driver, RZA. États-Unis. 1h43. Sortie le 14 mai

 

 

 

 

 

 

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