SÉDUIS-MOI SI TU PEUX ! : chronique

13-05-2019 - 19:18 - Par

SÉDUIS-MOI SI TU PEUX ! : chronique

Après 50/50 et THE NIGHT BEFORE, Jonathan Levine continue sa collaboration fructueuse avec Seth Rogen – auquel s’ajoute cette fois Charlize Theron. À la fois grosse comédie idiote, romcom touchante et chronique sarcastique de l’époque.

 

Seth Rogen aime incarner qui les grands enfants et les fumeurs de weed, qui les génies trop gentils ou les prétendus irresponsables, tous incapables – volontairement ou par la force des choses – de grandir, de se fondre dans une société fondée sur l’efficacité et la répartition très cartésienne des rôles. Cet archétype qu’il réifie parfaitement grâce à la bonhomie qui transpire de sa personne, parfait vecteur d’identification, Rogen le met toujours merveilleusement au service du cinéma de Jonathan Levine. Après les affres de l’amitié lors de situations tragiques ou charnières dans 50/50 puis THE NIGHT BEFORE, le duo se reforme cette fois pour mettre Rogen aux prises avec le grand amour. Journaliste d’investigation aux principes bien arrêtés, Fred Flarsky démissionne de son poste lorsque son petit journal est racheté par un magnat industriel qu’il abhorre. Par un concours de circonstances, il tombe alors sur celle qui fut sa baby-sitter, Charlotte (Charlize Theron), devenue depuis la Ministre américaine des affaires étrangères. Intéressée par le talent d’écriture de Fred, elle l’engage pour façonner et humaniser ses discours, alors qu’elle ambitionne de se présenter aux présidentielles… Lancé tête baissée dans les codes et recettes de la comédie romantique – au point d’être parfois un décalque, certes réussi, mais un décalque tout de même, de NOTTING HILL –, SÉDUIS-MOI SI TU PEUX ! rejoue l’histoire de la princesse et de la grenouille à l’ère des social justice warriors. De la screwball à la romcom, les contraires se sont toujours attirés à l’écran et c’est sur ce schéma narratif que fonctionne également SÉDUIS-MOI SI TU PEUX ! Du duo improbable formé par Seth Rogen en journaliste maladroit et Charlize Theron en femme de pouvoir, Jonathan Levine tire tout d’abord une grasse et tonitruante comédie, au rythme imparable. Rogen déroule les gags slapstick et les vannes débiles tandis que l’incroyable exercice de distance comique qu’entreprend Theron dresse les contours d’une ironie politique assez cinglante. Puis peu à peu, à mesure que le récit avance, une bascule subtile s’effectue : la comédie outrancière se laisse lentement contaminée par les sentiments et la romcom, tandis que les deux stars, au contact l’un de l’autre, s’épanouissent au-delà des registres auxquels ils sont trop souvent réduits. Rogen y gagne en prestance, Theron en proximité. Jusqu’à un dernier acte en forme d’apothéose à la fois féroce et tendre, où toutes les facettes du film se rejoignent en un tout cohérent : spectacle pop, déconstruction des clichés sexistes et racistes, portrait du patriarcat ordinaire et chronique pertinente des mécanismes socio-médiatico-politiques des années 2010, SÉDUIS-MOI SI TU PEUX ! érige son humaine grossièreté en rempart à la vulgarité de l’époque. 

De Jonathan Levine. Avec Charlize Theron, Seth Rogen, O’Shea Jackson Jr., June Diane Raphael, Ravi Patel, Bob Odenkirk. États-Unis. 2h05. Sortie le 15 mai

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