OLEG : chronique

30-10-2019 - 09:20 - Par

OLEG : chronique

À travers les galères d’un travailleur déplacé, Juris Kursietis tire un portrait effrayant d’une Europe déshumanisée.

 

Oleg est letton. Pour gagner sa vie et aider sa famille, il décide de partir en Belgique, où il a été embauché comme boucher dans une usine. Il vit dans un appartement avec plusieurs de ses collègues, eux aussi travailleurs déplacés venus de divers coins de l’Europe de l’Est. Un jour, un accident survient à l’usine et Oleg, accusé à tort d’en être responsable, est renvoyé. Commence pour lui une lente descente aux enfers, alors qu’il se retrouve aux prises d’un petit malfrat qui l’exploite… Dans son premier film, MODRIS, Juris Kursietis avait mis en scène un jeune homme de 17 ans dénoncé par sa mère et qui, incarcéré, espérait sortir de prison pour retrouver son père. Son deuxième long, OLEG, a beau se dérouler souvent à ciel ouvert, il n’en demeure pas moins une histoire d’enfermement d’une âme isolée, arrachée à son foyer par les circonstances. Une sensation accentuée par le format 1.33 choisi par Kursietis, auquel il rend justice avec des compositions soignées et une photographie d’une grande qualité, comme étouffant dans la grisaille et le froid. Alors on suit rongé par l’angoisse les galères qu’accumule Oleg, superbement campé par Valentin Novopolskij, « agneau sacrificiel » d’une Europe de l’Est payant encore les échos de la chute du bloc soviétique et de sa nouvelle allégeance au capitalisme le plus décomplexé. N’exagérant jamais au point de sombrer dans le pathos, OLEG apparaît d’une grande justesse, flirtant parfois avec le polar, comme si le monde dépeint, bien réel, ne pouvait pas être tout à fait illustré avec naturalisme. C’est sans doute dans ces élans-là qu’OLEG semble le plus marquant. Moins quand la caméra de Kursietis se fait scrutatrice, balayant avec frénésie chaque élément du cadre, tentant de capturer à l’image le moindre détail et recoin de l’environnement d’Oleg. Là, le film se fait peut-être plus évident, fatigant le spectateur d’un mouvement perpétuel qui est celui d’Oleg-même, dont le quotidien le force à ne jamais s’arrêter, respirer, espérer. Reste que le parti-pris interpelle et qu’OLEG, dans son portrait d’une Europe kafkaïenne incapable de prendre soin de ses populations, touche.

De Juris Kursietis. Avec Valentin Novopolskij. Lettonie/ Belgique. 1h48. Sortie le 30 octobre

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